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ATLAS TV

Hier, 12 mars, les autorités algériennes ont interrompu la diffusion de la chaîne de télévision algérienne Atlas TV après avoir procédé à la saisie de tout le matériel dans ses locaux à Birkhadem pour avoir couvert des manifestations organisées contre le quatrième mandat du président Abdelaziz Bouteflika. « A un mois des élections présidentielles, nous sommes préoccupés par la volonté politique d'étouffer toute voix dissidente. Les persécutions dont sont victimes les journalistes d'Al Atlas semblent confirmer l'escalade dans la répression orchestrée par les autorités de toute liberté d'opinion, d'expression et d'information », a déclaré Rachid Mesli, directeur du département juridique d'Alkarama.

« Bienvenue, le site c'est pour bientôt », peut-on lire sur le site web de la chaîne de télévision privée algérienne Al Atlas. Mais il semble que les autorités algériennes en aient décidé autrement. Le 11 mars, vers 16 heures, les locaux de cette chaîne de à Birkhadem, Alger, ont été investis par une dizaine de gendarmes en tenue civile qui ont procédé à une perquisition des lieux et à la confiscation de 17 caméras et de divers appareils sans présenter au directeur de la chaîne de motifs légaux.

Vers 17h30, trois avocats constitués par les dirigeants de la chaine, se sont rendus sur les lieux et ont demandé à voir un mandat de perquisition. L'un deux a confié à Alkarama que c'est à la requête du procureur de la république du tribunal d'Alger, Sidi M'hamed, qu'il avait été procédé à la perquisition « des caméras qui ont fait des victimes » dans le cadre d'une enquête pour « diffusion non autorisée ». Les avocats se sont toutefois étonnés de ne pas voir mentionnées dans le mandat de perquisition les bases légales la justifiant.

Les gendarmes ont également séquestré les 45 personnes travaillant pour la chaine et présentes dans les locaux en leur interdisant de quitter les lieux pendant plus de quatre heures et les ont photographié et filmé, probablement pour les intimider.

Le lendemain, un groupe de gendarmes et de policiers se sont de nouveau présentés dans les locaux d'Al Atlas TV accompagnés du procureur de la république près le tribunal de Sidi M'hamed et ont alors procédé à la saisie de toutes les caméras, appareils photos et divers matériels d'enregistrement. Ils ont cependant refusé de préciser à la direction de la chaine la teneur réelle ainsi que les motifs de ces investigations.

Selon M. Hafnaoui Ghoul, directeur de la rédaction d'Al Atlas TV, ces perquisitions sont le fruit d'une « vengeance des autorités après des émissions très critiques diffusées dans la perspective de l'élection présidentielle du 17 avril ».

La chaîne Al Atlas TV s'était en effet distinguée récemment par la couverture importante des manifestations organisées contre la candidature du président Abdelaziz Bouteflika à un quatrième mandat, lors du scrutin présidentiel du 17 avril prochain notamment par le mouvement "Barakat" («Assez ! »).

Depuis ces perquisitions, la diffusion de la chaine a été suspendue. La société basée en Jordanie en charge de la diffusion du programme, aurait reçu des pressions pour cesser l'émission. Aujourd'hui, plusieurs véhicules de gendarmes en civils demeurent stationnés devant les locaux d'Al Atlas TV et les studios de la chaine ont également été mis sous scellés.

Les employés d'Al Atlas ont organisé un sit-in devant les locaux de la chaine et une conférence de presse pour protester contre les persécutions dont ils sont victimes.

Il ne fait aucun doute que la saisie du matériel, la fermeture des locaux ainsi que la suspension de diffusion d'Al Atlas TV, sont la conséquence directe de l'exercice du droit de ses journalistes à informer les citoyens algériens et à exprimer librement leurs opinions. Elles visent très clairement à museler toute critique des autorités en place.

Les persécutions judiciaires et administratives qui pourraient s'en suivre constitueraient une atteinte grave à la liberté de la presse en Algérie. Ces actions sont d'autant plus inquiétantes qu'elles interviennent dans le cadre d'une campagne d'élections présidentielles marquée par la répression de rassemblements et de manifestations pacifiques.

Aujourd'hui, jeudi 13 mars 2014, Alkarama a sollicité l'intervention urgente du Rapporteur spécial sur la liberté d'expression de l'ONU auprès des autorités algériennes afin qu'elles mettent un terme à tout acte de persécution judiciaire et administrative à l'égard de des journalistes et de la chaine de télévision Al Atlas TV.