Dr Yousef Al-Ahmad, membre d'Alkarama et très engagé sur la douloureuse question de la détention arbitraire en Arabie Saoudite a été arrêté à Damman le 8 juillet 2011 par des agents de la direction générale des renseignements. Il est depuis détenu arbitrairement.
Le Dr Yousef Abdullah AL-AHMAD (يوسف بن عبد الله بن أحمد الأحمد), âgé de 42 ans habite à Riyad. Il est professeur d’université et doyen à la faculté de droit et des sciences religieuses à l’Université Mohamed Ibn Saoud à Riyad. Personnalité connue et respectée dans les milieux académiques, il a publié une trentaine d’ouvrages. En tant que défenseur des droits de l’homme en Arabie Saoudite, il est également membre d'Alkarama.
Dr AL-AHMAD a été arrêté à Dammam le 08 juillet 2011 vers 17 heures au domicile de son père, auquel il rendait visite, par des agents de la direction générale des renseignements (Al Mudiriya al aama li al mabahit) qui n’étaient pas munis d’un mandat de justice et qui ne l’ont pas informé des motifs de son arrestation. Il s’est vu immédiatement confisquer son ordinateur portable, son téléphone ainsi que les clefs de son véhicule.
Quelques heures plus tard, dans la nuit et en dehors des heures légales de perquisition, son domicile à Riyad a été fouillé, toujours sans mandat de justice, par des agents des services de renseignements qui ont notamment emporté de nombreux documents personnels.
Le lendemain, samedi 09 juillet , M. Al-Ahmad a été transféré à bord d’un avion spécial des services de sécurité à Riyad où il a été emmené au siège de ces mêmes services. Plus tard dans la soirée, il a été autorisé à contacter très brièvement sa famille par téléphone pour les informer qu’il se trouvait à Riyad et qu’il faisait officiellement l’objet de l’accusation de « sortir de l’autorité du roi » (sédition) et de « désobéissance publique envers l’autorité ».
Selon ses proches ainsi que les militants des droits de l’homme dans le pays, il ne fait aucun doute que cette arrestation est motivée par le rôle particulièrement actif joué par le Dr Al-Ahmad sur la question des personnes détenues arbitrairement dans le pays.
Dr AL-AHMAD est en effet personnellement engagé sur cette douloureuse question et il est notamment en contact avec de très nombreuses familles de victimes qui le sollicitaient pour intercéder en leur faveur auprès des autorités royales.
Il a ainsi en date du 17 mai 2011, adressé un Memorandum au Roi au nom de 1225 familles de victimes, dans lequel il dresse le bilan extrêmement préoccupant de la situation des droits de l’homme dans le pays et le saisit de la dégradation de la situation de ces personnes détenues sans jugement depuis de nombreuses années. Ce Memorandum a été rendu public et a suscité l’ouverture d’un large débat dans la société civile saoudienne sur la question notamment de la nécessité du respect des dispositions légales internes.
Le Dr AL-AHMAD a également critiqué la répression d’une manifestation pacifique des familles des victimes devant le ministère de l’intérieur le 1er juillet 2011 et de l’arrestation des mères et épouses de prisonniers politiques.
Le 06 juillet suivant, dans un enregistrement vidéo posté sur le site YouTube (1), il a réitéré son appel au ministre de l’intérieur à respecter et à appliquer la loi pour résoudre la question des personnes détenues sans jugement et critiqué le rôle joué par les services de son ministère et les graves atteintes à la liberté et à la dignité de milliers de victimes. Dans cet appel, il invite ce dernier à visiter les prisons et centres de détention du pays pour mesurer l’ampleur du problème.
Dr AL-AHMAD a été arrêté à la suite de ces initiatives. Officiellement les autorités l'ont interpellé « dans le cadre de la lutte contre la cybercriminalité », dans le but de mettre un terme aux revendications des familles des victimes qu’il représentet et clore ainsi définitivement tout débat public sur cette question.
Il ne fait donc pas de doute que l’arrestation du Dr AL-AHMAD est motivée par son rôle de défenseur des droits de l’homme qui dénonce régulièrement et avec courage les abus et les violations des droits humains dans son pays ainsi que par l’exercice de son droit à exprimer librement et pacifiquement ses opinions politiques sur un problème de société.
Alkarama a adressé un appel urgent le 13 juillet 2011 à la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l’homme, lui demandant d'intervenir auprès des autorités saoudiennes. L'appel a été transmis au même moment au Rapporteur spécial sur la liberté d’opinion et d’expression, au Rapporteur spécial sur la torture ainsi qu'au Groupe de travail sur la détention arbitraire.
(1) Lien internet de l’enregistrement vidéo : http://www.youtube.com/watch?v=Ud8Jj6uYPbk (Consulté la dernière fois le 13 juillet 2011)