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Le 26 janvier, Alkarama a écrit au Comité des droits des personnes handicapées des Nations Unies, lui demandant d'intervenir auprès des autorités saoudiennes concernant l'éminent prédicateur islamique, le Dr Salman Alodah, concernant sa détention arbitraire, les représailles contre sa famille  et pour permettre que des médecins indépendants lui rendent visite pour évaluer son état et ses besoins et faire rapport à son sujet.

Auparavant, Alkarama avait renvoyé au même comité le cas du cheikh Safar al-Hawali,  mais  le régime saoudien continue de réprimer  ses plus éminents dissidents, en les emprisonnant de manière  arbitraire, dans des conditions cruelles et inhumaines, ce qui a causé à un nombre d'entre eux à devenir handicapés.

Un exemple de la répression saoudienne contre ses plus éminents dissidents
 
Alkarama avait précédemment soumis aux Nations Unies le cas du célèbre érudit islamique Salman Alodah - dont l'arrestation le 9 septembre 2017 a marqué le début d'une importante répression de la liberté d'expression en Arabie saoudite. Le Dr Alodah a été arrêté pour avoir publié un message sur Twitter à ses 14 millions d'adeptes, exprimant son soutien à la médiation entre les dirigeants saoudiens et qataries. Le message disait : "Que Dieu réconcilie leurs cœurs pour le bien de leur peuple".

Depuis son arrestation arbitraire, les autorités n'ont cessé de maintenir le Dr Alodah en dehors de la protection de la loi, avec de longues périodes de détention au secret. Il est en isolement total depuis le premier jour et a été soumis à la privation sensorielle, ainsi qu'à d'autres formes de torture physique et psychologique. Les autorités ont établi leur intention de punir le Dr Alodah pour son refus de se conformer à la demande du prince héritier de soutenir publiquement sa politique. Les autorités pénitentiaires lui ont refusé les médicaments nécessaires jusqu'en janvier 2018, date à laquelle sa santé s'est tellement détériorée qu'il a été hospitalisé d'urgence en raison d'une hypertension artérielle mettant sa vie en danger.

Son procès devant la Cour de sûreté de l'État (CSC) a commencé le 4 septembre 2018, lorsque le procureur général Saud al-Mojeb et son adjoint, Mohammed bin Ibraheem al-Subait, ont demandé la peine de mort contre lui en raison de 37 chefs d'accusation vaguement définis, tous liés à son plaidoyer pour les droits de l'homme et sa participation politique. Malgré son état de santé et l'injustice de son procès, le Dr Alodah pourrait être condamné à une exécution  arbitraire et cruelle.

Les graves déficiences d'Alodah résultant de ses conditions de détention

Fin novembre 2020, sa famille a appris par le personnel médical de la prison qu'il avait acquis une grave déficience bilatérale de ses fonctions visuelles, ce qui représentait une perte d'au moins la moitié de sa capacité visuelle antérieure. Lorsque sa famille l'a rencontré, il a confirmé la nouvelle. Aujourd'hui, il est confronté à un risque réel de cécité, compte tenu du refus de traitement et de réhabilitation. De même, il a acquis une déficience auditive qui a également été évaluée à plus de la moitié de sa capacité antérieure. Bien que les autorités n'aient pas expliqué les causes probables de ces baisses brutales et dramatiques de sa vision et de son audition, nous pouvons déduire de la situation et des informations disponibles qu'elles peuvent être dues à une maladie, un traumatisme ou un effet secondaire d'un médicament.

Entre-temps, son état de santé s'étant dégradé, il s'est vu refuser des soins médicaux et a été contraint de prendre des médicaments psychotropes non identifiés ni par la famille ni par la victime elle même jusqu'à ce jour. Sa famille a constaté progressivement, mais de façon encore plus marquée ces derniers mois, sa grave émaciation ainsi qu'une diminution cognitive et un trouble mental.

Le comportement indifférent des autorités saoudiennes et leur persistance à maltraiter le Dr Alodah ne font que confirmer leur intention de le tuer lentement, une crainte exprimée par son fils dans un article récent.

Les demandes d'Alkarama  au Comité des droits des personnes handicapées

Le Dr Alodah est délibérément privé de la jouissance et de l'exercice de ses droits fondamentaux par les autorités sur deux bases concomitantes : d'abord en tant que dissident, puis en tant que personne ayant acquis de graves handicaps pendant sa détention. Les autorités continuent de lui refuser le logement, les soins médicaux et de réadaptation dont il a besoin, ce qui entraîne des limititations et des restrictions irréversibles dans l'accès à ses droits.  

Dans ces conditions, le Dr Alodah a continué à être détenu arbitrairement et le refus de lui fournir des soins médicaux constitue une menace directe, grave et imminente pour son droit à la vie. Cela est d'autant plus préoccupant dans le contexte actuel de la pandémie de COVID-19 que les personnes âgées courent un risque sensiblement accru de développer une maladie grave à la suite d'une infection du COVID-19. Les experts de l'ONU ont averti que "la transmission généralisée du Covid-19 dans la communauté au sein d'un établissement pénitentiaire est susceptible d'entraîner un taux de mortalité disproportionnellement élevé".

Dans ce contexte, de nombreux experts de l'ONU et des institutions internationales ont appelé les États à «libérer immédiatement et sans condition tous les prisonniers dont l'emprisonnement est illégal ou arbitraire au regard du droit international, y compris tous les enfants, prisonniers d'opinion, prisonniers religieux et prisonniers politiques». Le Comité permanent inter-organisations - composé de représentants de l'Organisation mondiale de la santé et du Haut-Commissariat aux droits de l'homme - a publié des directives similaires appelant les autorités publiques à prendre des mesures immédiates pour garantir la libération des personnes prioritaires pour les conditions de santé (...) et les personnes détenues pour avoir commis des crimes non reconnus au regard du droit international".

À son tour, Alkarama a demandé au Comité des droits des personnes handicapées d'intervenir directement auprès des autorités saoudiennes, afin de libérer immédiatement le Dr Alodah comme procédure d'urgence pour éviter toutes représailles contre sa famille.  Alkarama a également exhorté le comité à demander aux autorités d'autoriser une délégation de médecins indépendants à visiter le Dr Alodah pour évaluer et signaler son état et ses besoins.

Enfin, Alkarama a souligné le manque total de transparence au niveau des soins médicaux dans les prisons saoudiennes et a insisté  pour qu'il soit libéré en toute sécurité et renvoyé dans sa famille afin d'éviter un préjudice potentiel et irréparable dans son droit le plus fondamental à la vie.