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saoudite

Alkarama exprime son choc suite au décès de l'universitaire saoudien Musa Al-Qarni pendant sa détention, après près de 15 ans de détention, malgré la publication d'une résolution de l'ONU confirmant la nature arbitraire de sa détention avec huit autres personnalités, dont le militant politique Saud Mukhtar Al-Hashemi, pour qui Alkarama avait soumis une communication aux procédures spéciales des Nations Unies.
La mort d'Al-Qarni a été annoncée le mardi 12 octobre 2021 et il devient ainsi comme la deuxième personnalité de l'opposition politique saoudienne à mourir dans les prisons du Royaume en moins de deux ans, puisque l'éminent militant et prisonnier politique, le Dr Abdullah Al-Hamid "Abu Bilal", est mort plus tôt dans des circonstances similaires. Ceci soulève de sérieuses inquiétudes quant au sort de centaines de prisonniers d'opinion, de militants et de défenseurs des droits humains dans le pays.

Musa Al-Qarni
Le Dr Musa Al-Qarni a été arrêté le 2 février 2007 par les services de renseignement saoudiens, et emmené avec d'autres personnes à la prison de Dhahban à Djeddah, et soumis à diverses formes de torture et de mauvais traitements. En novembre 2011, le tribunal pénal spécialisé a prononcé une peine de 20 ans de prison à son encontre avec interdiction de voyage. Le procès était manifestement inéquitable.
Selon plusieurs sources crédibles, Al-Qarni a été soumis à d'horribles tortures. Il a été maintenu en isolement et a été forcé de se tenir sur un pied pendant de longues heures. On lui a également refusé l'accès à des médicaments contre le diabète et la tension, sans parler de la torture psychologique, des humiliations et d'autres formes d'abus qui ont causé une attaque cérébrale puis à la mort.
Le docteur Al-Qarni est né en 1954 à Jazan, dans le sud de l'Arabie saoudite. Il est décédé à l'âge de 67 ans. Il était un érudit dans les principes de la jurisprudence. Il a obtenu une maîtrise et un doctorat avec d'excellentes notes. Il a travaillé comme chef du département de jurisprudence à l'Université islamique et a supervisé des dizaines de thèses scientifiques.
Le 13 janvier 2010, le Dr Musa Al-Qarni, le Dr Saud Mukhtar Al-Hashimi et leurs compagnons ont été transférés de Jeddah à une prison de Riyad, mais il semble qu'ils aient ensuite été renvoyés à la prison de Dhahban à Jeddah.
Les familles des détenus des villes saoudiennes reçoivent des appels téléphoniques des services de renseignement les informant du processus d'expulsion vers la capitale, Riyad, sans leur donner d'explications supplémentaires. Les prisonniers d'opinion et les partisans de la réforme politique dans le Royaume ont été inculpés d'accusations inventées de toutes pièces, telles que « opposition au dirigeant », « incitation de l'opinion publique contre le dirigeant », « appartenance à un groupe interdit », « soutien à la résistance palestinienne, " etc.

Saud Mukhtar Al Hashemi
L'universitaire et militant politique Saud Mukhtar Al-Hashemi est toujours détenu, alors qu'il entre dans sa seizième année de prison. Il souffre de plusieurs maladies, notamment d'anémie, de diabète en raison de la longue période d'emprisonnement. Il est aussi confronté à des difficultés l'empêchant d'avoir des médicaments de manière régulière
Selon la famille d'Al-Hashemi, il sont autorisés à lui rendre visite tous les trois mois derrière une vitre avec inerdiction de lui apporter de la nourriture ou des vêtements. Al-Hashemi purge une peine injuste de 30 ans de prison, suite à un procès inéquitable devant le tribunal pénal spécialisé. Il n'a pas été autorisé à faire appel.  Alkarama compte saisir une nouvelle fois les procédures spéciales des Nations Unies afin de rappeler le cas du Dr Saud Al-Hashemi et d'autres personnes détenues depuis des années.

La décision de l'équipe onusienne
Dans sa résolution n° 27/2007, le Groupe de travail sur la détention arbitraire a noté que l'arrestation du Dr Musa Al-Qarni, du Dr Saud Al-Hashemi et de sept autres personnalités connues de la société civile saoudienne constitue une violation grave de la Déclaration universelle des droits de l'homme.
La décision de l'équipe de l'ONU a été prise sur la base d'une plainte soumise par Alkarama le 14 février 2007, demandant une intervention urgente suite à l'arrestation et à la détention des neuf personnalités suivantes :
- Dr Saud Mukhtar Al-Hashimi, Docteur en médecine, 45 ans, militant des droits de l'homme, bien connu dans les milieux œuvrant pour l'introduction de réformes constitutionnelles dans le Royaume.
- M. Musa Al-Qarni, professeur d'université, militant pour les libertés publiques et les réformes constitutionnelles,
- M. Suleiman Al-Rashudi, avocat et militant des droits de l'homme, est impliqué dans la défense des prisonniers de conscience en Arabie saoudite, et dans ce contexte, il lutte pour établir le droit de ces accusés à avoir un procès juste et équitable. Selon certaines informations, il a été libéré en décembre 2017, après environ cinq ans de détention,
- M. Issam El-Bashrawy, avocat, et militant pour les libertés publiques et les réformes constitutionnelles,
- M. Abd al-Rahman al-Shamiri, ancien professeur d'université, a été licencié de son poste pour des raisons liées à son engagement politique en faveur des réformes constitutionnelles,
- M. Abdulaziz Al-Khuraiji, Docteur en médecine, combattant pour les libertés publiques et les réformes constitutionnelles,
- M. Abdul Rahman Sadiq Khan, chercheur universitaire, militant pour les libertés publiques et les réformes constitutionnelles,
- M. Sherif Seif El-Din Chahine, homme d'affaires, combattant pour les libertés publiques et les réformes constitutionnelles,
- M. Mohamed Hassan Al-Qurashi, homme d'affaires, défenseur des libertés publiques et des réformes constitutionnelles.

Le Groupe de travail sur la détention arbitraire a examiné la situation des détenus et a enregistré un certain nombre de points qui constituent de graves violations des droits de l'homme.
Selon les informations obtenues par Alkarama, la plupart des membres du groupe ont été libérés, à l'exception de Musa Al-Qarni, décédé il y a deux jours, et de Saud Al-Hashimi, qui souffre d'une détérioration de son état de santé.


Les mérites de la résolution de l'ONU
Il convient de noter que ces personnalités, dont le Dr Al-Hashemi en particulier, sont connues pour leurs positions publiques et explicites sur des questions de politique intérieure, ou liées à des événements internationaux, notamment à travers les contributions de ces personnalités dans les médias arabes, comme c'est le cas pour la cause palestinienne ou l'occupation américaine de l'Irak. Les autorités officielles saoudiennes avaient demandé à plusieurs reprises au Dr Al-Hashemi de ne pas donner d'interviews à Al-Jazeera, mais il a néanmoins participé, trois jours avant son arrestation, à des discussions télévisées, dans lesquelles il a revendiqué la nécessité de mener des réformes politiques dans son pays.
Le 2 février 2007, lors de la réunion de ces neuf personnalités dans la maison de l'un des participants pour discuter du projet de création d'un comité de défense des droits civils et politiques et de la nécessité de réformes constitutionnelles dans le pays, ils ont tous été arrêtés  par les services de renseignement de Jeddah.
Le groupe de travail des Nations Unies a écrit au gouvernement saoudien au sujet de ces arrestations et lui a demandé de répondre à une série de questions relatives aux problèmes en question, tandis que ces autorités ont réitéré leurs allégations selon lesquelles ces personnes sont accusées de "soutenir et financer le terrorisme" et d'"activités illégales liées à la collecte et au transfert de fonds pour des parties suspectes".
À un moment ultérieur de leur détention, sept détenus, sur les neuf, ont été transférés de la prison d'Al-Ruwais à Jeddah vers des lieux d'assignation à résidence, où ils ont été autorisés à recevoir leurs familles, mais sans leur permettre de quitter ces résidences. Quant aux docteurs Saud Al-Hashemi et Musa Al-Qarni, ils ont été maintenus en isolement complet.

Al-Qarni, Al-Hashimi et leurs compagnons avaient entamé à plusieurs reprises une grève de la faim, pour protester contre les conditions difficiles de leur détention et les restrictions qui leur étaient imposées, en plus du maintien en détention sans procédure légale par les autorités saoudiennes, au seul motif d'exercer leurs droits fondamentaux à l'expression libre et pacifique de leurs opinions politiques.
Le Groupe de travail sur la détention arbitraire a noté que le gouvernement saoudien n'a pas nié les déclarations des détenus confirmant la nature politique de ces arrestations, et l'appel à la liberté d'expression et au droit de réunion pacifique qui y est lié.
L'équipe de l'ONU a également enregistré que l'arrestation et le mauvais traitement de ces neuf personnalités constituent une violation des articles de la Déclaration universelle des droits de l'homme, notamment les articles 9 (qui interdit l'arrestation et la détention arbitraires), 19 (qui garantit la liberté d'opinion et la liberté d'expression) et 20 (qui garantit la liberté de formation de groupes et la liberté de réunion pacifique).
Le groupe de travail a appelé le Royaume à rectifier cette situation afin qu'elle soit conforme aux procédures pertinentes de la Déclaration universelle des droits de l'homme et a recommandé que le Royaume d'Arabie saoudite ratifie le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.