01 oct 2007
Alkarama for Human Rights, 1 octobre 2007
Le Comité des droits de l'homme a notifié à l'avocat de M. Ali Benhadj ses Constatations , rendues au cours de sa 90ème session tenue à Genève du 9 au 27 juillet 2007, dans l'affaire de la condamnation de M. Ali Benhadj à 12 années de réclusion criminelle par le tribunal militaire de Blida.
Le Groupe de travail de l'ONU sur la détention arbitraire saisi le 16 janvier 2001 avait déjà déclaré arbitraire la détention des principaux dirigeants du FIS dans un avis rendu le 3 décembre 2001 et avait demandé au gouvernement algérien " de prendre les mesures nécessaires pour remédier à la situation et la mettre en conformité avec les principes énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l'Homme et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ".
Aucune suite n'avait alors été donnée par le gouvernement algérien à cet avis de l'ONU, suite à quoi la famille de M. Ali Benhadj, représentée par Maître Rachid Mesli, avait saisi le Comité des droits de l'Homme, organe de surveillance de la Convention internationale ratifiée par l'Algérie le 12 septembre 1989, considérant que sa condamnation par un tribunal militaire à la suite d'un procès manifestement inéquitable ainsi que les conditions inhumaines de sa détention au secret, constituaient une violation par l'Algérie de ses obligations internationales.
Le Comité des droits de l'Homme de l'ONU vient donc de faire droit à la plainte déposée à Genève le 31 mars 2003 au nom du vice-président du FIS dissous.
Le Comité a relevé en particulier le fait que M. Ali Benhadj avait été jugé en 1992 par un tribunal militaire pour " atteinte à la sûreté de l'Etat " et au " bon fonctionnement de l'économie nationale " sans que L'Etat algérien n'ait alors justifié le recours à ce tribunal ni démontré que les tribunaux civils ordinaires ou " d'autres formes alternatives de tribunaux spéciaux ou de haute sécurité " n'étaient pas en mesure d'entreprendre ce procès. " De surcroît, le procès n'a pas été public sans que le tribunal n'avance de justifications légales et certains de ses avocats n'ont pas pu comparaître devant le tribunal. Le Comité conclut que le procès et la condamnation de Ali Benhadj par un tribunal militaire constituent une violation de l'article 14 du Pacte ".
Le Comité relève le fait que pendant sa détention au secret, Ali Benhadj n'a pas eu accès à un avocat et n'a pu contester la légalité de sa détention. Il n'y a donc pas eu de possibilité d'introduire un recours afin de savoir si cette détention était compatible avec le Pacte. Etant donné que les autorités algériennes n'ont pas fourni d'explications satisfaisantes, le Comité conclut à une violation du paragraphe 4 de l'article 9 du Pacte par l'Etat partie.
L'article 10 du Pacte stipule que "toute personne privée de sa liberté est traitée avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine". Or, dans le cas de Ali Benhadj, le Comité constate que ce principe a été violé par l'Etat algérien: Ali Benhadj a subi des brutalités, a été détenu plusieurs fois dans le quartier des condamnés à mort, a été détenu dans des conditions inhumaines, notamment dans un cachot où il ne pouvait ni se tenir debout, ni s'allonger. Les autorités algériennes n'ont pas fourni d'explications à ce sujet.
Le Comité des droits de l'homme conclut que l'Etat algérien " est tenu d'assurer un recours utile à M. Ali Benhadj " et de " prendre des mesures appropriées pour faire en sorte qu'il obtienne une réparation appropriée y compris sous forme d'indemnisation. "
Enfin l'Instance Onusienne déclare que l'Etat algérien " est tenu de prendre des mesures pour empêcher que des violations analogues ne se reproduisent dans l'avenir " et demande à l'Etat partie de lui communiquer dans un délai de 90 jours des renseignements sur les mesures prises pour donner effet à cette décision en l'invitant à la rendre publique.
Pour rappel:
Ali Benhadj (né le 16 décembre 1956) est l'un des fondateur et le vice-président du Front islamique du Salut (FIS), parti agréé par le gouvernement algérien en 1989. A la veille des élections législatives en juin 1991 et après la victoire du FIS aux élections communales de 1990, le gouvernement envisageait de faire adopter une nouvelle loi électorale qui avait suscité la condamnation unanime des partis d'opposition algériens. En guise de protestation contre cette loi, le FIS a décidé d'organiser une grève générale accompagnée de sit-in sur les places publiques. Après quelques jours de grèves et de marches, la direction du FIS et le gouvernement ont convenu de mettre un terme à ce mouvement de protestation en échange d'une révision prochaine de la loi électorale. Cependant, le 3 juin 1991, le chef du gouvernement a été contraint de démissionner et les places publiques étaient prises d'assaut par l'armée algérienne qui a ouvert le feu contre les manifestants.
Le 29 juin 1991 Ali Benhadj a été arrêté par des agents du DRS (Département du renseignement et de la sécurité) au siège de la télévision publique où il s'était rendu pour exprimer la position de son parti. Il a été présenté le 2 juillet 1991 devant un magistrat instructeur auprès du tribunal militaire pour être inculpé de "crime contre la sûreté de l'Etat " et " atteinte au bon fonctionnement de l'économie nationale ". Les avocats de Ali Benhadj qui avaient dénoncé le caractère strictement politique de l'affaire avaient dès le départ contesté le bien fondé des poursuites devant une juridiction militaire incompétente pour juger des civils ainsi que la régularité de l'instruction assurée par un magistrat militaire subordonné au parquet.
Lors du premier tour des élections législatives du 26 décembre 1991 une majorité des sièges ont été remportés par des candidats du FIS, et dès le lendemain des résultats officiels, le procureur militaire avait fait part aux avocats de la défense de son intention de mettre fin aux poursuites contre Ali Benhadj. Mais le 12 janvier 1992, le Président de la République " démissionnait ", les élections législatives étaient annulées. Puis, le 9 février, l'état d'urgence a été proclamé, en mars, le FIS a été interdit le 4 mars 1992 et le 15 juillet 1992, le tribunal militaire de Blida a condamné Ali Benhadj, absent à l'audience, à 12 années de réclusion criminelle. Le pourvoi en cassation a été rejeté par la Cour suprême le 15 février 1993, rendant ainsi la condamnation pénale définitive.
Pendant son emprisonnement, Ali Benhadj a été soumis à diverses formes de détention et traité différemment, selon qu'il était considéré comme un interlocuteur politique ou non. Il a été détenu à la prison militaire de Blida de juillet 1991 à avril 1993 où il a subi des brutalités physiques. Il a ensuite été transféré à la prison civile de Tizi-Ouzou où il a été soumis à un isolement total dans le quartier des condamnés à mort pendant plusieurs mois. Il a de nouveau été emprisonné dans la prison militaire de Blida jusqu'à l'échec des négociations politiques, suite à quoi, il a été transféré le 1 février 1995 dans une caserne militaire à l'extrême Sud de l'Algérie. Détenu au secret pendant quatre mois et six jours dans des conditions difficiles, dans une cellule exiguë, sans aération ni possibilité d'hygiène. A la suite de l'ouverture de nouvelles négociations avec le général Zeroual, il a été transféré à Djennane Al Mithaq à Alger résidence d'Etat habituellement réservée aux hauts dignitaires en visite en Algérie.
Dès l'échec de ces nouvelles négociations, il a été, le jour même transféré dans un lieu de détention secret dans l'extrême Sud du pays, probablement une caserne militaire. Il y a été enfermé dans un cachot dans lequel il ne pouvait ni s'allonger ni se tenir debout, dans un isolement complet pendant deux ans. Il a engagé de nombreuses grèves de la faim brutalement réprimées par les geôliers.
Transféré en automne 1997 à la prison militaire de Blida il a continué à être détenu au secret deux autres années. Pendant quatre années au total, sa famille ignorait son lien de détention et s'il était encore en vie.
Ce n'est qu'en mars 1999 que sa famille a reçu de ses nouvelles et a été autorisée à lui rendre visite. M. Ali Benhadj a cependant continué à faire l'objet de mauvais traitements à la prison militaire, notamment à la suite de ses lettres envoyées au Président de la République.
Il a été libéré le 2 juillet 2003 après avoir purgé la totalité de sa peine.
A la veille de sa libération, il lui a été demandé de renoncer à toute activité politique ainsi qu'à tous ses droits civiques et à signer un document en ce sens, ce qu'il a refusé.
Passant outre, dès le lendemain de sa libération, un communiqué officiel conjoint des autorités militaires et du ministère de l'intérieur lui notifiaient par voie de presse l'interdiction d'exercer ses droits les plus élémentaires sous le prétexte que ces interdictions étaient accessoires à sa peine de réclusion.
M. Ali Benhadj a fait savoir à son avocat qu'il se réservait d'ailleurs le droit de saisir de nouveau le Comité des droits de l'homme de l'ONU pour ces nouvelles violations par les autorités algériennes de ses droits civils et politiques.
Le Comité des droits de l'homme a notifié à l'avocat de M. Ali Benhadj ses Constatations , rendues au cours de sa 90ème session tenue à Genève du 9 au 27 juillet 2007, dans l'affaire de la condamnation de M. Ali Benhadj à 12 années de réclusion criminelle par le tribunal militaire de Blida.
Le Groupe de travail de l'ONU sur la détention arbitraire saisi le 16 janvier 2001 avait déjà déclaré arbitraire la détention des principaux dirigeants du FIS dans un avis rendu le 3 décembre 2001 et avait demandé au gouvernement algérien " de prendre les mesures nécessaires pour remédier à la situation et la mettre en conformité avec les principes énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l'Homme et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ".
Aucune suite n'avait alors été donnée par le gouvernement algérien à cet avis de l'ONU, suite à quoi la famille de M. Ali Benhadj, représentée par Maître Rachid Mesli, avait saisi le Comité des droits de l'Homme, organe de surveillance de la Convention internationale ratifiée par l'Algérie le 12 septembre 1989, considérant que sa condamnation par un tribunal militaire à la suite d'un procès manifestement inéquitable ainsi que les conditions inhumaines de sa détention au secret, constituaient une violation par l'Algérie de ses obligations internationales.
Le Comité des droits de l'Homme de l'ONU vient donc de faire droit à la plainte déposée à Genève le 31 mars 2003 au nom du vice-président du FIS dissous.
Le Comité a relevé en particulier le fait que M. Ali Benhadj avait été jugé en 1992 par un tribunal militaire pour " atteinte à la sûreté de l'Etat " et au " bon fonctionnement de l'économie nationale " sans que L'Etat algérien n'ait alors justifié le recours à ce tribunal ni démontré que les tribunaux civils ordinaires ou " d'autres formes alternatives de tribunaux spéciaux ou de haute sécurité " n'étaient pas en mesure d'entreprendre ce procès. " De surcroît, le procès n'a pas été public sans que le tribunal n'avance de justifications légales et certains de ses avocats n'ont pas pu comparaître devant le tribunal. Le Comité conclut que le procès et la condamnation de Ali Benhadj par un tribunal militaire constituent une violation de l'article 14 du Pacte ".
Le Comité relève le fait que pendant sa détention au secret, Ali Benhadj n'a pas eu accès à un avocat et n'a pu contester la légalité de sa détention. Il n'y a donc pas eu de possibilité d'introduire un recours afin de savoir si cette détention était compatible avec le Pacte. Etant donné que les autorités algériennes n'ont pas fourni d'explications satisfaisantes, le Comité conclut à une violation du paragraphe 4 de l'article 9 du Pacte par l'Etat partie.
L'article 10 du Pacte stipule que "toute personne privée de sa liberté est traitée avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine". Or, dans le cas de Ali Benhadj, le Comité constate que ce principe a été violé par l'Etat algérien: Ali Benhadj a subi des brutalités, a été détenu plusieurs fois dans le quartier des condamnés à mort, a été détenu dans des conditions inhumaines, notamment dans un cachot où il ne pouvait ni se tenir debout, ni s'allonger. Les autorités algériennes n'ont pas fourni d'explications à ce sujet.
Le Comité des droits de l'homme conclut que l'Etat algérien " est tenu d'assurer un recours utile à M. Ali Benhadj " et de " prendre des mesures appropriées pour faire en sorte qu'il obtienne une réparation appropriée y compris sous forme d'indemnisation. "
Enfin l'Instance Onusienne déclare que l'Etat algérien " est tenu de prendre des mesures pour empêcher que des violations analogues ne se reproduisent dans l'avenir " et demande à l'Etat partie de lui communiquer dans un délai de 90 jours des renseignements sur les mesures prises pour donner effet à cette décision en l'invitant à la rendre publique.
Pour rappel:
Ali Benhadj (né le 16 décembre 1956) est l'un des fondateur et le vice-président du Front islamique du Salut (FIS), parti agréé par le gouvernement algérien en 1989. A la veille des élections législatives en juin 1991 et après la victoire du FIS aux élections communales de 1990, le gouvernement envisageait de faire adopter une nouvelle loi électorale qui avait suscité la condamnation unanime des partis d'opposition algériens. En guise de protestation contre cette loi, le FIS a décidé d'organiser une grève générale accompagnée de sit-in sur les places publiques. Après quelques jours de grèves et de marches, la direction du FIS et le gouvernement ont convenu de mettre un terme à ce mouvement de protestation en échange d'une révision prochaine de la loi électorale. Cependant, le 3 juin 1991, le chef du gouvernement a été contraint de démissionner et les places publiques étaient prises d'assaut par l'armée algérienne qui a ouvert le feu contre les manifestants.
Le 29 juin 1991 Ali Benhadj a été arrêté par des agents du DRS (Département du renseignement et de la sécurité) au siège de la télévision publique où il s'était rendu pour exprimer la position de son parti. Il a été présenté le 2 juillet 1991 devant un magistrat instructeur auprès du tribunal militaire pour être inculpé de "crime contre la sûreté de l'Etat " et " atteinte au bon fonctionnement de l'économie nationale ". Les avocats de Ali Benhadj qui avaient dénoncé le caractère strictement politique de l'affaire avaient dès le départ contesté le bien fondé des poursuites devant une juridiction militaire incompétente pour juger des civils ainsi que la régularité de l'instruction assurée par un magistrat militaire subordonné au parquet.
Lors du premier tour des élections législatives du 26 décembre 1991 une majorité des sièges ont été remportés par des candidats du FIS, et dès le lendemain des résultats officiels, le procureur militaire avait fait part aux avocats de la défense de son intention de mettre fin aux poursuites contre Ali Benhadj. Mais le 12 janvier 1992, le Président de la République " démissionnait ", les élections législatives étaient annulées. Puis, le 9 février, l'état d'urgence a été proclamé, en mars, le FIS a été interdit le 4 mars 1992 et le 15 juillet 1992, le tribunal militaire de Blida a condamné Ali Benhadj, absent à l'audience, à 12 années de réclusion criminelle. Le pourvoi en cassation a été rejeté par la Cour suprême le 15 février 1993, rendant ainsi la condamnation pénale définitive.
Pendant son emprisonnement, Ali Benhadj a été soumis à diverses formes de détention et traité différemment, selon qu'il était considéré comme un interlocuteur politique ou non. Il a été détenu à la prison militaire de Blida de juillet 1991 à avril 1993 où il a subi des brutalités physiques. Il a ensuite été transféré à la prison civile de Tizi-Ouzou où il a été soumis à un isolement total dans le quartier des condamnés à mort pendant plusieurs mois. Il a de nouveau été emprisonné dans la prison militaire de Blida jusqu'à l'échec des négociations politiques, suite à quoi, il a été transféré le 1 février 1995 dans une caserne militaire à l'extrême Sud de l'Algérie. Détenu au secret pendant quatre mois et six jours dans des conditions difficiles, dans une cellule exiguë, sans aération ni possibilité d'hygiène. A la suite de l'ouverture de nouvelles négociations avec le général Zeroual, il a été transféré à Djennane Al Mithaq à Alger résidence d'Etat habituellement réservée aux hauts dignitaires en visite en Algérie.
Dès l'échec de ces nouvelles négociations, il a été, le jour même transféré dans un lieu de détention secret dans l'extrême Sud du pays, probablement une caserne militaire. Il y a été enfermé dans un cachot dans lequel il ne pouvait ni s'allonger ni se tenir debout, dans un isolement complet pendant deux ans. Il a engagé de nombreuses grèves de la faim brutalement réprimées par les geôliers.
Transféré en automne 1997 à la prison militaire de Blida il a continué à être détenu au secret deux autres années. Pendant quatre années au total, sa famille ignorait son lien de détention et s'il était encore en vie.
Ce n'est qu'en mars 1999 que sa famille a reçu de ses nouvelles et a été autorisée à lui rendre visite. M. Ali Benhadj a cependant continué à faire l'objet de mauvais traitements à la prison militaire, notamment à la suite de ses lettres envoyées au Président de la République.
Il a été libéré le 2 juillet 2003 après avoir purgé la totalité de sa peine.
A la veille de sa libération, il lui a été demandé de renoncer à toute activité politique ainsi qu'à tous ses droits civiques et à signer un document en ce sens, ce qu'il a refusé.
Passant outre, dès le lendemain de sa libération, un communiqué officiel conjoint des autorités militaires et du ministère de l'intérieur lui notifiaient par voie de presse l'interdiction d'exercer ses droits les plus élémentaires sous le prétexte que ces interdictions étaient accessoires à sa peine de réclusion.
M. Ali Benhadj a fait savoir à son avocat qu'il se réservait d'ailleurs le droit de saisir de nouveau le Comité des droits de l'homme de l'ONU pour ces nouvelles violations par les autorités algériennes de ses droits civils et politiques.