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Lors de la « marche du million » organisée le 18 novembre dernier, les forces égyptiennes de la sécurité centrale ont fait usage de gaz lacrymogènes et ont tiré à balles réelles sur les manifestants pour tenter de les disperser. Dans d'autres villes du pays, les services de sécurité ont également fait un usage excessif de la violence, causant 33 morts et des centaines de blessés parmi les manifestants.
La fondation Alkarama condamne les membres des services de sécurité qui continuent de faire un usage excessif de la force en toute impunité. Ceux-ci n'ont jamais été traduits en justice pour les centaines de morts dont ils sont responsables depuis le début de la Révolution du 25 janvier. Ce climat d'impunité ne fait que les encourager à commettre plus d'exactions contre les manifestants. Certains continuent même d'exercer leurs fonctions au ministère de l'Intérieur sans être inquiétés.

 

En début de semaine dernière, les partis politiques en Egypte ont appelé à une manifestation pacifique sur la place Tahrir pour exiger le retrait d'un projet de loi, connu sous le nom de « charte Al-Salmy » présenté par le vice premier ministre Ali Al-Selmy , visant à modifier le droit de contrôle du parlement sur l'armée. La manifestation visait aussi à appeler le Conseil de l'armée égyptienne à transmettre le pouvoir à une autorité civile dans le délai imparti par la Déclaration de la constitution faite après la révolution. Une manifestation qui aurait dû se dérouler de manière pacifique a vite dégénéré lorsque les forces de la sécurité centrale se sont attaquées aux manifestants en faisait un usage excessif de la force pour les disperser.


Loin de parvenir à disperser les manifestants, les actions des forces de sécurité n'ont fait qu'attiser leur colère et que grossir leurs rangs sur la place Tahrir et dans d'autres gouvernorats du pays.

Les forces de sécurité ont répondu par la violence en visant à la tête et aux yeux les manifestants avec des balles en caoutchouc ou réelles, des fusils, causant de nombreux morts et blessés. L'armée a prêté renfort aux forces de sécurité en attaquant les manifestants à coup de gaz lacrymogènes, de balles en caoutchouc et de fusils de chasse. Après le retrait de la police militaire, les forces de la sécurité générale ont continué à faire un usage excessif de la force contre les manifestants en particulier sur la rue Mohamed Mahmoud près de la place Tahrir conduisant à d'autres morts.

Les affrontements meurtriers qui ont eu lieu sur la place Tahrir depuis le 19 novembre 2011 témoignent de l'incapacité du ministère de l'Intérieur à réaliser les changements promis et constituent une violation des droits à la liberté d'expression et au rassemblement du peuple égyptien. Alkarama craint que le Conseil de l'armée et le gouvernement égyptien ne continuent à promettre à la communauté internationale de respecter les droits de l'homme tout en continuant de commettre des exactions contre son peuple.

Il est primordial de traduire en justice les responsables, notamment les fonctionnaires de haut rang du ministère de l'Intérieur ainsi que ceux de la police militaire et des autres services de sécurité afin de mettre un terme au climat d'impunité qui règne en Egypte. Un calendrier clair devrait être mis en place pour que les responsables rendent des comptes devant la justice.

 

Alkarama a suivi de près la situation en Egypte pour soumettre des informations au Haut Commissariat aux Droits de l'homme et aux autres mécanismes onusiens des droits de l'homme sur les violations des droits de l'homme commises contre le peuple égyptien.

 

Attaques contre les organisations de la société civile qui sont accusées de travailler pour l'intérêt d'organisations étrangères, tentatives de ternir la réputation de ceux qui prennent part aux manifestations pacifiques, utilisation de véhicules pour écraser les manifestants comme lors des événements de Maspero, arrestation de militants, procès de civils devant des tribunaux militaires... les pratiques des autorités égyptiennes actuelles ne sont pas sans rappeler le gouvernement défunt, mettant ainsi en jeu leur réputation sur la scène internationale dans cette période transitoire.

Alkarama conclut que toute mesure prise par les autorités égyptiennes pour parvenir à une solution politique ne sera pas suffisante si elle ne s'accompagne pas de la mise en œuvre immédiate des actions suivantes : le jugement des responsables des exactions, une réforme en profondeur du ministère de l'Intérieur et de l'appareil sécuritaire et l'ouverture d'une enquête prompte, indépendante et impartiale sur toutes les violations commises par les services de sécurité, toutes branches confondues, depuis février 2011.