Dans la soirée du mardi 9 avril 2024, les forces de sécurité jordaniennes ont arrêté le jeune Syrien, Atiya Mohammed Salim, et son collègue Abdulrahman Al-Sheikh alors qu'ils se rendaient filmer une manifestation de solidarité avec le peuple palestinien contre l'agression israélienne dans la bande de Gaza. Cet incident s'est produit dans le quartier de Rabia à Amman à la veille de l'Aïd al-Fitr, les deux étant étudiants à la Faculté des médias de l'Université de Yarmouk en Jordanie. Atiya a été emmené au centre de sécurité de Shmeisani.
Atiya est un ressortissant syrien qui réside en Jordanie depuis qu’il s’y est réfugié il y a 12 ans. En plus de ses études, il travaille de manière indépendante dans le domaine de la production cinématographique et des médias visuels.
À ce jour, et six jours après son arrestation, Atiya n'a pas été présenté au procureur ou au gouverneur administratif d'Amman, et aucune charge n'a été retenue contre lui. Cependant, un ordre d'expulsion a été émis à son encontre par le ministère jordanien de l'Intérieur.
Au cours de l'interrogatoire, Atiya a été forcé de déverrouiller et de présenter son téléphone et a été soumis à de nombreuses violations dont il a informé son avocat. La menace d'expulsion et de rapatriement vers la Syrie était constamment présente pendant les séances d'interrogatoire.
Le droit d'expulser des étrangers du territoire jordanien est limité, l’expulsion sur la seule base de soupçons étant irraisonnable. Atiya n'a été reconnu coupable d'aucune violation en vertu des lois jordaniennes, et il ne peut pas être expulsé s'il existe dans le pays de renvoi un risque pour sa vie.
Le Centre National des Droits de l'Homme et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés ont été informés de la situation d'Atiya. Par l'intermédiaire de la Commission des libertés de l'Ordre des avocats, des poursuites judiciaires seront engagées à l'égard de ces violations. En outre, un recours a été déposé auprès du tribunal administratif pour empêcher l'expulsion, la décision n'ayant pas encore été rendue.
Outre le danger que représente l’expulsion pour Atiya, celle-ci aura des répercussions et un impact significatif sur sa famille. La mère d'Atiya souffre d'un cancer, et c'est son fils aîné, résidant en Jordanie qui se charge de subvenir à ses besoins et de l'accompagner lors de ses rendez-vous médicaux et de ses séances de chimiothérapie. Si l'ordre d'expulsion est mis en œuvre, son calvaire s'aggravera avec la perte de son pourvoyeur !
Refoulement
Le rapatriement forcé de réfugiés syriens de la Jordanie vers la Syrie est considéré comme une violation du droit international, y compris de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et de son Protocole de 1967, même s'ils n'en sont pas signataires. Le rapatriement forcé de réfugiés syriens dans leur pays constitue une violation de l'article 3 de la Convention contre la torture, à laquelle la Jordanie est partie et qui interdit absolument l'expulsion de toute personne vers un lieu où elle risque d'être torturée. Cette pratique est dangereuse car susceptible de mettre les réfugiés en danger et les exposer à la violence et à la persécution dans leur pays d'origine. De telles actions constituent une violation des obligations internationales liées à la protection des réfugiés.
Nous, organisations de la société civile de défense des droits de l'homme soussignées, appelons la Jordanie à reconsidérer la décision d'expulsion dans le respect des normes relatives aux droits de l'homme et conformément aux conventions internationales auxquelles la Jordanie a adhéré et à sa législation nationale.
Les organisations signataires de cette déclaration sont :
AFD International
AlKarama - Genève
Centre Américain pour la justice
Fondation du Conseil Arabe
Association des Victimes de la Torture - Genève
Association Daralyaqeen
L'ESOHR
Freedom Jasmine
Habaq pour la formation et le développement des droits de l'homme
Solidarité Droits de l'Homme
Association internationale des juristes syriens
Lawyers.Org internationale
Déclaration du peuple jordanien pour Gaza
Justice pour la paix
Avocats et médecins pour les droits de l'homme
Alliance libyenne américaine
Organisation de développement local
Groupe des familles de personnes disparues
Association Mizan pour la recherche juridique et les droits de l'homme
Nophotozone
Peace Research & Security Studies (PRSS)
Rights Radar pour les droits de l'homme
Salam pour la démocratie et les droits de l'homme
SAM Organisation pour les Droits et les Libertés
Sans menotté
Association Talsa _ Libye
Tunisian United Network
Association Zaytouna