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Alkarama est vivement préoccupé par l'état de santé de Abdessamad Bettar actuellement hospitalisé au service de réanimation de l'hôpital Mohamed V à Safi, après 80 jours d'une grève de la faim entamée pour protester contre le caractère inéquitable de son procès et les tortures subies en détention.

 

Arrêté le 5 mai 2011 devant son magasin à Safi (Sud du Maroc) par quatre policiers de la DST sous prétexte d'avoir renversé quelqu'un avec son vélomoteur, il a été conduit, les yeux bandés au commissariat de Maarif à Casablanca et détenu au secret durant 12 jours au cours desquels il a subi de graves tortures. Il a été forcé de signer, sous la torture, des procès verbaux sans les avoir lu.

Présenté devant le Procureur du Roi de Rabat le 17 mai 2011, il a été accusé d'avoir participé à l'attentat de Marrakech du 28 Avril 2011 et déféré le même jour devant le juge d'instruction du Tribunal de Salé.

Abdessamad Bettar se trouvait alors dans un état déplorable et a nié dès sa comparution tout lien avec les accusations portées contre lui ; il a fait part au magistrat instructeur des tortures subies lors de sa garde à vue et du fait qu'il avait été obligé de signer des procès verbaux sans les avoir lu, sans que le juge n'accorde la moindre attention à ses déclarations.

Bien qu'aucune preuve ni aucun élément matériel ne sont venus étayer les accusations portées contre lui, il a été inculpé et placé en détention provisoire à la prison de Toulal 2 de Meknès.

Détenu en isolement durant plusieurs mois, il a encore subi des traitements inhumains et dégradants pendant sa détention; il a notamment été complètement déshabillé, insulté et battu à de nombreuses reprises par les gardiens.

Déféré devant la juridiction de jugement le 28 Octobre 2011, il a été condamné à quatre années d'emprisonnement ferme à la suite d'un procès particulièrement expéditif, sous les accusations fallacieuses de« constitution d'une organisation criminelle en vue de préparer des actions terroristes dans le but de porter atteinte à l'ordre public...», de «  défaut de dénonciation d'un crime terroriste » de « tenue de réunions publiques sans autorisation préalable » et d'« exercice d'activités dans une association non autorisée ».

Ces accusations n'étaient évidemment étayées par aucune preuve ou éléments matériels et aucun des nombreux prétendus témoins figurant dans le procès verbal de police n'ont été cités à comparaître à l'audience par l'accusation.

Comme dans la grande majorité des affaires de « terrorisme » déférés devant la justice marocaine à partir de 2003 à la suite des attentats de Casablanca, les juges se sont contentés des seuls procès verbaux établis par la police et signés sous la contrainte à la suite de graves tortures pour prononcer leur condamnation.


Après sa condamnation, M. Bettar a interjeté appel du jugement et a entamé une grève de la faim pour protester contre les conditions inéquitables de son procès.

Lors de son jugement en appel, le 09 mars 2012 et alors même que le Parquet n'a présenté aucun nouvel élément au dossier, sa peine a été aggravée et portée à 10 ans de prison. Là encore aucune des règles élémentaires pour un procès équitable n'ont été respectées.

Abdessamad Bettar a alors entamé une grève de la faim illimitée le 9 avril 2012 pour clamer son innocence et protester contre le caractère inéquitable de son procès et les tortures et subies lors de sa détention.

Son état de santé s'est dégradé au point où il a été transféré d'urgence à l'hôpital Ibn Sina (Rabat) le 17 juin dernier où il a été hospitalisé pendant dix jours.

Le 27 juin 2012, Abdessamad Bettar a reçu la visite des représentants de l'administration pénitentiaire, des membres l'association Mountada El Karama (Forum de la Dignité pour les Droits de l'Homme) et de l'Instance Marocaine pour les Droits de l'Homme, à la suite de laquelle il a décidé de suspendre sa grève de la faim à condition qu'il puisse jouir de tous ses droits de détenu.

Il a également été convenu lors de cette rencontre qu'une enquête soit ouverte sur les actes de torture qu'il a subi, en attendant que son dossier soit réexaminé et qu'il puisse avoir un procès équitable.

Le 29 Juin 2012, alors qu'il pensait être conduit vers l'hôpital Ibn Sina à Rabat, il s'est rendu compte que l'administration de la prison avait décidé de le transférer à la prison de Safi, à plus de 300km de Salé, sans l'informer et alors que son état de santé ne lui permettait pas de voyager.

Il a alors poursuivi sa grève de la faim suspendue quelques jours avant et refusé même de boire de l'eau. Il a perdu connaissance et a été conduit d'urgence à l'hôpital Mohamed V de Safi.

Alkarama a saisi aujourd'hui les Procédures Spéciales des Nations Unies de sa situation.