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Le 5 mai 2017, le Groupe de travail sur l'Examen périodique universel (EPU), établi par le Conseil des droits de l'homme (CDH), a adopté son rapport contenant les recommandations adressées par les États membres des Nations Unies au Maroc lors de son examen le 2 mai 2017. Les États ont félicité les efforts déployés par le Maroc depuis son dernier EPU, mais se sont toutefois dits préoccupés par la persistance de la torture, la peine de mort, le harcèlement des journalistes et les restrictions imposées aux droits à la liberté d'expression, d'association et de réunion pacifique, faisant ainsi écho aux préoccupations d'Alkarama soulevées dans son rapport de septembre 2016. D’autres problématiques importantes ont été soulevées par les États membres, parmi lesquelles la violence à l'égard des femmes et la non-incrimination du viol conjugal, le droit à l'éducation, les droits de l'enfant et la persistance du mariage des enfants.

Pratique de la torture et la peine de mort

Malgré le fait que le pays a ratifié la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (UNCAT) en 1993, la torture reste préoccupante au Maroc et les violations graves demeurent impunies. En 2013, après sa visite dans le pays, le Rapporteur spécial sur la torture a signalé que bien que la pratique ait considérablement reculé depuis 2011, elle subsistait encore pendant l'arrestation et la garde à vue dans les cas de sûreté de l'État, y compris le terrorisme et l'adhésion ou le soutien de mouvements œuvrant pour l’indépendance du Sahara occidental. Le principal problème reste l'absence d’enquêtes efficaces, rapides et indépendantes lorsque des allégations de torture à l’encontre de détenus sont soulevées devant les autorités judiciaires. Au cours de l'EPU, plusieurs États membres, dont la Grèce, le Guatemala, l'Espagne et la Suisse, ont recommandé au Maroc d’adopter une définition de la torture en conformité avec l’UNCAT et d'établir un mécanisme national de prévention contre la torture indépendant, efficace et doté des ressources nécessaires, conformément au Protocole facultatif relatif à ladite convention.

Compte tenu du rejet par le Maroc du principe de l'abolition de jure de la peine de mort, de nombreux États Membres, dont la France, le Monténégro, l'Italie, l'Afrique du Sud, l'Estonie, l'Australie, la Belgique et la Norvège, ont néanmoins renouvelé leur recommandation de ratifier le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à l'abolition absolue de la peine capitale et ont encouragé le Maroc à maintenir le moratoire de facto actuel. Comme souligné dans le rapport d'Alkarama, même si elle n’est pas appliquée de facto, la peine capitale reste au sommet de la hiérarchie des sanctions pénales et s'applique aux crimes d'homicide aggravé, de torture, de vols à main armée, d'incendie criminel, de trahison, de désertion et d’atteinte à la vie du roi ou de tout membre de la famille royale.

Atteinte aux libertés d'expression, d'association et de réunion pacifique

Malgré les efforts du Maroc depuis son deuxième EPU, le droit à la liberté d'opinion et d'expression n'est toujours pas entièrement garanti. Comme souligné dans le rapport d'Alkarama, depuis 2012, des poursuites continuent d’être intentées contre les journalistes pour « insulte au roi » ou «atteinte à l'intégrité territoriale » quand il s’agit du Sahara occidental. En outre, l'organisation de manifestations demeure difficile dans la pratique pour les partis politiques, les syndicats et les associations, et nécessite une autorisation préalable du gouvernement. Dans son rapport, Alkarama avait rappelé que seules les ONG officiellement enregistrées étaient autorisées à organiser des manifestations et que les forces de police recouraient régulièrement à l’usage excessif et injustifié de la force afin de disperser les manifestations pacifiques.

En outre, au cours de l'examen, plusieurs États membres, dont le Danemark, la France, le Qatar, les Pays-Bas, la Suède, les États-Unis et l'Irlande, ont fait écho aux préoccupations d'Alkarama recommandant au Maroc de garantir pleinement les libertés d'expression, d'information, de réunion et d'association pacifiques et de créer un environnement sûr pour les défenseurs des droits de l'Homme et la société civile pour mener à bien leurs activités pacifiques. Ils ont par ailleurs recommandé au Maroc d'éliminer tous les obstacles aux associations qui souhaitent s’enregistrer et de mettre fin à la poursuite des journalistes et autres personnes détenues uniquement pour avoir exercé pacifiquement leurs droits civils et politiques.

Manque d'efficacité et d'indépendance des mécanismes nationaux des droits de l'homme

Malgré l'engagement du Maroc à renforcer ses institutions nationales des droits de l'homme et à mieux protéger les droits de l'homme, notamment par la création d'un Conseil consultatif pour les droits de l'homme et d'un mécanisme national de prévention –  rôle assumé par le Conseil national des droits de l'homme –, la marge de manœuvre de ces mécanismes reste en pratique restreinte. Dans son rapport, Alkarama a mis en évidence plusieurs lacunes, notamment le manque d’efficacité et d’indépendance, et a appelé les États membres à recommander au Maroc d'assurer l'indépendance et l'efficacité des mécanismes nationaux de défense des droits de l'homme vis-à-vis de l'exécutif.

Plusieurs États membres ont ainsi fait écho aux préoccupations d'Alkarama, dont les Philippines, le Togo, la République de Corée, Bahreïn, la République centrafricaine et Madagascar, et ont encouragé le Maroc à poursuivre ses efforts pour établir et consolider le rôle et la capacité des institutions nationales et mécanismes pour une meilleure promotion et protection des droits de l'homme.

Quelle est la prochaine étape ?

Le Maroc a reçu 244 recommandations des Etats Membres de l'ONU, qu’il doit examiner avant septembre 2017, et informer le Conseil des droits de l'homme de celles qu’il accepte ou rejette. L'Etat devra ensuite mettre en œuvre, avant le quatrième cycle de l'EPU prévu en 2021, les recommandations acceptées, afin d'améliorer la situation des droits de l'homme sur le terrain.

Pour plus d'informations ou une interview, veuillez contacter media@alkarama.org (Dir: +41 22 734 10 08).