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Des organisations des droits de l'homme ont aujourd'hui sollicité deux Rapporteurs spéciaux des Nations Unies afin qu'ils mènent une enquête sur le cas d'Abou Elkassim Britel, citoyen italien victime du programme illégal de « restitutions extraordinaires » de la CIA. Abou Elkassim Britel est actuellement détenu dans une prison marocaine sur la base d'aveux extorqués sous la torture.

L'Union américaine pour les libertés civiles (ACLU) et Alkarama for Human Rights ont demandé au Rapporteur spécial sur la torture et au Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme dans la lutte contre le terrorisme d'enquêter sur les circonstances de la disparition forcée et de la « restitution » dont a été victime Britel ainsi que sur ses conditions de détention et sur les actes de torture qu'il a subis. Les deux organisations ont en outre sollicité les Rapporteurs spéciaux afin qu'ils fassent appel aux gouvernements des Etats-Unis, du Maroc, du Pakistan et de l'Italie concernant le cas de Britel.

 

"Les victimes du programme de «restitutions extraordinaires» détenues à Guantánamo et dans d'autres prisons à travers le monde sont ignorées par le gouvernement américain. C'est ce programme illégal du gouvernement américain qui permet d'expliquer en premier lieu la situation des victimes », a déclaré Steven Watt, avocat pour le programme des droits de l'homme de l'ACLU. " Les Etats-Unis ont refusé de reconnaître leur responsabilité concernant les actes les plus graves qu'ils ont commis, laissant ainsi M. Britel et d'innombrables autres victimes du programme de  « restitutions extraordinaires » sans autre choix que de se tourner vers la communauté internationale pour que justice soit faite."

 

Britel est aussi un plaignant dans l'affaire qui oppose  l'ACLU à Jeppesen DataPlan, filiale du groupe Boeing, pour son rôle dans le programme de «restitutions». C'est l'une des rares victimes de ce programme dont l'identité est connue et qui est toujours détenue en dehors de Guantánamo Bay.

 

Britel a d'abord été interpellé et détenu au Pakistan en février 2002 par les autorités pakistanaises pour avoir soi-disant violé des lois sur l'immigration. Après y avoir été détenu et interrogé pendant quelques temps, il a été remis à des responsables américains.

 

En mai 2002, des fonctionnaires américains ont déshabillé et battu Britel avant de lui mettre une couche et une salopette. Ils l'ont ensuite enchaîné, lui ont bandé les yeux et l'ont mis dans un avion à destination du Maroc pour y être détenu et interrogé. A son arrivée au Maroc, des fonctionnaires américains l'ont remis à des agents des services de renseignement marocains qui l'ont détenu au secret dans le centre de détention de Temara, où il a été interrogé, battu, privé de sommeil, de nourriture et menacé de torture sexuelle.

 

"Compte tenu du témoignage de M. Britel sur la manière dont il a été traité et du fait qu'il est historiquement avéré que les centres de détention gérés par le gouvernement marocain sont depuis longtemps des lieux de pratique de la torture et autres mauvais traitements, nous avons de solides raisons de croire que M. Britel a été, et est actuellement soumis à la torture », a déclaré Rachid Mesli, directeur du Département juridique d'Alkarama. " M. Britel et toutes les victimes de « restitution extraordinaire » méritent de comparaître devant un tribunal et de bénéficier d'un procès équitable qui ne soit pas entaché d'irrégularités telles que l'utilisation d'aveux extorqués sous la torture. Nous espérons que les Rapporteurs spéciaux agiront sans délai suite à notre requête pour attirer rapidement l'attention (attention plus que nécessaire) sur le cas de M. Britel avant que les conditions dans lesquelles il est détenu ne portent plus atteinte à sa santé physique et mentale. "

 

Selon la requête auprès des Rapporteurs spéciaux, Britel, après avoir été remis en liberté par les autorités marocaines en février 2003, a été de nouveau arrêté et détenu en mai 2003 alors qu'il tentait de quitter le Maroc pour rentrer chez lui en Italie. Alors qu'il était détenu au secret dans le même centre de détention où il avait été sauvagement torturé quelques mois plus tôt, Britel a fait sous la torture de faux aveux sur son implication dans des activités terroristes. Quelques temps après, Britel a été jugé et condamné par un tribunal marocain pour avoir été impliqué dans des activités terroristes et purge actuellement une peine de neuf ans dans une prison marocaine.

En 2006, un juge d'instruction italien a prononcé un non-lieu au terme de six ans d'une enquête supposée faire la lumière sur la prétendue implication de Britel dans des activités liées au terrorisme. Si le juge a agi de la sorte, c'est qu'il a constaté le manque de preuves associant Britel  à des activités criminelles ou terroristes.