CCPR/CO/84/SYR/Add.1
Paragraphe 6
Conformément au paragraphe 5 de l’article 70 du Règlement intérieur du Comité des droits de l’homme, qui prévoit la présentation de renseignements sur les mesures prises par les états parties en application des recommandations du Comité, la République arabe syrienne s’efforcera dans le présent document de donner, documents à l’appui, une image claire de la législation syrienne et de sa concordance avec les droits énoncés dans le Pacte, de façon à répondre aux recommandations formulées par le Comité aux paragraphes 6, 8, 9 et 12 de ses observations finales.
Le décret législatif no 51 du 22 décembre 1962 (tel que modifié par le décret législatif no 1 du 9 mars 1963) portant proclamation de l’état d’urgence est une loi constitutionnelle d’exception motivée par l’existence d’un danger imminent qui menace la nation en raison duquel les autorités compétentes sont habilitées à prendre toutes les dispositions prévues dans la loi pour protéger toute ou partie du sol et de l’espace maritime et aérien national contre les dangers résultant d’une agression armée extérieure.
Depuis 1988, Israël fait peser sur la République arabe syrienne, qui est un membre fondateur de l’Organisation des Nations Unies, tout comme sur d’autres états arabes voisins, une réelle menace de guerre qui s’est à plusieurs reprises concrétisée par une agression dirigée contre le territoire, les eaux territoriales et l’espace aérien de la République arabe syrienne, en particulier en 1967, année où Israël s’est emparé d’une partie du territoire de la République arabe syrienne, qu’il continue d’ailleurs d’occuper jusqu’à présent et dont il a expulsé la majorité de la population. Les dernières en date de ces agressions sont l’attaque menée contre Ein al‑Saheb le 5 octobre 2003 et la violation de l’espace aérien syrien le 28 juin 2006.
Cette menace réelle de guerre, conjuguée à la poursuite de l’occupation d’une partie du territoire de la République arabe syrienne et la menace concrète d’occupation de nouveaux territoires, en violation des résolutions de l’Organisation des Nations Unies, a créé une situation d’exception ayant nécessité la mobilisation rapide et exceptionnelle des forces en République arabe syrienne et, par conséquent, la promulgation d’une législation propre à assurer une prompte réaction pour faire face à ces dangers imminents, conformément à la Constitution et aux lois en vigueur en République arabe syrienne. La promulgation de la loi précitée et son maintien en vigueur étaient donc indispensables.
La loi d’urgence est appliquée de la manière la plus restreinte et dans des cas très précis et ne passe nullement avant la Constitution, les lois et les engagements internationaux de l’état.
Soucieux d’éviter tout abus dans l’exécution des dispositions de la loi d’urgence, le législateur a soumis son application à différentes conditions et a autorisé l’annulation par les tribunaux compétents de décisions prises en vertu de cette loi d’exception. Parmi les décisions de justice portant annulation de décisions adoptées en vertu de la loi d’exception figurent les suivantes:
- Décision du tribunal administratif no 140 du 6 avril 1995;
− Décision du tribunal administratif no 1/726 de 2002;
− Décision du tribunal administratif no 1/1242 du 22 septembre 2002;
− Décision du tribunal administratif no 1951 du 19 décembre 2002 concernant l’affaire no 2139 de 2002.
Paragraphe 8
Le Gouvernement syrien a pris l’initiative de créer une commission syro-libanaise chargée d’enquêter sur le sort des Libanais et des Syriens disparus en Syrie et au Liban. Les membres syriens de cette commission sont: le juge Taysir Qalaawad (Ministère de la justice), le brigadier général Georges Thane (Procureur général militaire), le brigadier général Moudhaher Ahmed (Directeur du Département de l’immigration et des passeports), M. Ahmed Abdelaziz (Directeur de Cabinet du Premier Ministre). Du côté libanais, la commission est composée des personnalités suivantes: le juge Joseph Mimari (Procureur général auprès de la cour d’appel de Beyrouth), le juge Georges Rizq (juge d’instruction auprès du tribunal militaire), le brigadier général Ali Mekki (forces de sécurité intérieures) et M. Abdelahafidh Itani (chef de service au bureau du Procureur général de la cour d’appel à Beyrouth). La commission syro-libanaise a été créée de façon régulière par les autorités des deux pays et peut prendre les mesures nécessaires en toute indépendance. Les activités de la commission sont la meilleure preuve de sa crédibilité et il convient de signaler que l’enquête porte sur toutes les circonstances qui ont entouré les disparitions et se déroule dans le respect des principes juridiques applicables en la matière. Pour être efficace, la commission a décidé de fonder ses efforts de recherche des disparus libanais en Syrie et des disparus syriens au Liban sur la coopération et la coordination entre les deux parties. Le travail accompli par la commission se caractérise par son humanité qui reflète les relations fraternelles qui lient les deux pays.
Sur le plan pratique, la commission a tenu une série de réunions du 29 octobre 2005 au 29 avril 2006. La partie syrienne a reçu la réponse des autorités libanaises concernant les disparus syriens dont le nombre s’élève à 1 088. Cette réponse contenait des informations sur le sort de 2 d’entre eux seulement. De même, la partie libanaise a reçu la réponse des autorités syriennes concernant les Libanais disparus en Syrie dont le nombre est de 724. La partie syrienne a donné des renseignements sur le sort de 8 personnes indiquant qu’il s’agissait de ressortissants syriens qui avaient été condamnés par la justice puis libérés en application d’une amnistie présidentielle. La partie libanaise affirme qu’il s’agit de nationaux libanais. La partie libanaise a également reçu une réponse au sujet de 88 personnes se trouvant dans les prisons syriennes ainsi que sur la citoyenne libanaise Anhad Fayez Noun, laquelle est actuellement détenue à la prison centrale de Homs pour trafic de stupéfiants. En ce qui concerne l’exécution du citoyen libanais Bassem Riadh Mothlej le 22 mai 1992, le texte du jugement a été communiqué à la partie libanaise qui a aussi reçu une réponse concernant le sort de 32 autres Libanais donnant des détails sur les peines prononcées contre eux, la durée de leur détention et la date de la libération de certains d’entre eux.
La prochaine réunion de la commission est prévue pour le 27 mai 2006. On notera que le nombre des disparus libanais et syriens correspond aux chiffres fournis par les deux parties. Dans le cadre de ses activités, la commission a adopté une série de mesures pratiques décrites dans les procès‑verbaux de ses réunions qui rendent compte du sérieux avec lequel elle accomplit sa tâche. Il ressort des procès-verbaux des réunions de la commission que des Libanais ont été remis aux autorités libanaises. De même, les registres des autorités syriennes indiquent que des Libanais ont été arrêtés en Syrie et remis aux autorités libanaises entre 1991 et 2005. Il y a lieu de mentionner à ce propos que l’une des principales caractéristiques de la commission mixte syro‑libanaise tient au professionnalisme et au strict respect des lois dont elle fait preuve dans l’accomplissement de sa tâche. La partie syrienne a reçu du Liban un mémoire comportant le nom de quatre Libanais disparus à rayer de la deuxième liste libanaise, les autorités libanaises ayant retrouvé leurs corps dans un cimetière situé au Liban. Il s’agit des personnes suivantes:
1. Robert Osserhal
2. Georges Bachour
3. Milad al‑Elm
4. Jean Khouri
Paragraphe 9
La République arabe syrienne a adhéré à la Convention des Nations Unies contre la torture en application du décret législatif n° 39 de janvier 2004 et présente des rapports périodiques sur l’application de cet instrument. Les dispositions de la Convention ont la primauté sur les lois en vigueur en Syrie, et chaque individu ou représentant en justice a le droit de les invoquer devant les tribunaux et de demander leur application en cas de conflit avec les lois internes. La législation syrienne interdit aux fonctionnaires chargés d’appliquer la loi de porter atteinte aux libertés, d’infliger des mauvais traitements aux personnes sur lesquelles ils enquêtent ou de recourir à la violence sous peine de sanctions sévères prévues dans le Code pénal et dans la loi sur le régime pénitentiaire. à cet égard, aux termes de l’article 357 du Code pénal, quiconque arrête une personne dans des circonstances autres que celles prévues par la loi est passible d’une peine d’emprisonnement assortie de travaux forcés. En vertu de l’article 358, tout directeur ou gardien de prison ou d’établissement disciplinaire ou de rééducation ou toute personne investie de leurs pouvoirs qui admet dans son établissement un détenu sans décision de justice ou qui retient une personne dans l’établissement pendant une période plus longue que celle spécifiée dans la décision de justice s’expose à une peine d’un à trois ans d’emprisonnement. En vertu de l’article 359 du Code pénal, les personnes susmentionnées et, de façon générale, tous les officiers et les agents de la force publique et tous les fonctionnaires qui refusent ou retardent la présentation d’un détenu ou d’un prisonnier au juge compétent qui en fait la demande sont passibles d’un mois à une année d’emprisonnement. Quiconque refuse de présenter immédiatement le registre d’une prison ou d’un lieu de détention à un juge qui en fait la demande encourt la même peine.
En vertu de l’article 391 du Code pénal, quiconque soumet une personne à des actes illégaux de violences en vue de l’obliger à confesser une infraction ou à fournir des informations à son sujet est passible d’une peine allant de trois mois à trois ans d’emprisonnement. Si de tels actes causent une maladie ou des blessures, la peine minimum est d’un an d’emprisonnement.
D’autre part, l’article 30 de la loi sur le régime pénitentiaire (décision 1122 du 20 juin 1929), telle que modifiée, et la loi no 496 de 1957 interdisent à tout fonctionnaire ou gardien de prison de traiter brutalement des détenus, de manger ou de boire avec les détenus, même après leur libération, ou avec des membres de leur famille, leurs amis ou leurs visiteurs, de fumer à l’intérieur de la prison ou d’être en état d’ébriété pendant le service. Il est également interdit à ces personnes de faire travailler des détenus en vue d’en tirer un avantage personnel, de leur demander de les aider dans leur travail, sauf dans des circonstances particulières prévues par le règlement, d’accepter tout cadeau, prêt ou commission de détenus ou de personnes qui les représentent, de faire quelque chose à leur demande, de procéder à l’achat ou à la vente d’un objet pour leur compte, de faciliter ou de tolérer toute communication illégale avec les détenus par courrier ou de toute autre façon.
Toute infraction aux règles en vigueur est passible, en fonction de sa gravité, des peines prévues dans le règlement de l’établissement ou de celles qui peuvent se révéler nécessaires en vertu des articles 67 et suivants du Code pénal relatifs à la corruption et aux coups et blessures. Tout fonctionnaire qui viole les dispositions de la Convention contre la torture peut faire l’objet des mesures décrites ci-après:
- Il peut être traduit devant un tribunal disciplinaire ou un conseil de discipline qui peut lui imposer des sanctions allant de l’avertissement au licenciement;
- Il peut en outre faire l’objet de poursuites judiciaires actionnées par le Procureur général sur la base d’une plainte déposée par la victime (des poursuites peuvent également être engagées dans certains cas sans qu’une plainte ait été déposée).
Dans tous les cas la victime a le droit de demander d’être dédommagée du préjudice matériel et moral subi. à cet égard de nombreux fonctionnaires ayant abusé de leurs pouvoirs ont été sanctionnés par la justice et obligés à indemniser leur victime.
En plus des jugements signalés précédemment il y a lieu également de mentionner les suivants:
- Jugement no 334 concernant la plainte pénale no 82, prononcé à Alep le 9 décembre 1999. En vertu de ce jugement, un adjudant de première classe et un agent de police ont été déclarés coupables de sévices ayant causé la mort et condamnés à une peine de travaux forcés à terme. Les proches de la victime ont été autorisés à réclamer une indemnisation;
- Jugement no 212 concernant la plainte pénale no 339, prononcé le 31 août 2002 à Alep: deux agents de police ayant le grade d’adjudant de première classe ont été reconnus coupables de sévices ayant causé la mort et condamnés à une peine de travaux forcés à terme et à payer un montant de 700 000 livres syriennes en guise d’indemnisation aux proches de la victime.
Paragraphe 12
La loi sur les associations et les organisations privées (loi no 93 de 1958) et son règlement d’application habilitent le Ministère des affaires sociales et du travail à se prononcer sur les demandes d’enregistrement des organismes de la société civile qui remplissent les conditions fixées par la loi, après consultation des autorités compétentes. Lorsqu’il est saisi d’une demande, le Ministère vérifie que les buts de l’organisation et son domaine d’action sont du ressort du Ministère et conformes aux orientations de l’état sur le plan social et en matière de développement.
Le Ministère a autorisé par le passé, et en particulier ces deux dernières années, l’enregistrement d’un grand nombre d’organisations de la société civile travaillant dans le domaine des droits de l’homme et s’occupant notamment des droits de l’enfant, des droits de la femme, des droits des personnes handicapées, de la protection des prisonniers et d’autres groupes de personnes ayant des besoins particuliers. Le Ministère exécute avec ses organisations des programmes conjoints visant à assurer à ceux qui en ont besoin la protection sociale requise et à faciliter la réalisation de projets de développement destinés à créer des emplois.
Toutefois, le Ministère des affaires sociales et du travail n’a pas fait droit aux demandes de certaines organisations s’occupant des droits de l’homme dont le but et les activités avaient un caractère essentiellement politique et dont l’action s’apparentait davantage à celle d’un parti politique. De ce fait, les demandes ne relevaient pas de la compétence du Ministère des affaires sociales et du travail, étant régies par d’autres lois que celles applicables aux organismes de la société civile.
Il y a lieu de signaler, d’autre part, que le Ministère a simplifié l’année passée la procédure d’enregistrement des associations, ce qui a permis d’enregistrer un grand nombre d’entres elles. Les organisations agréées sont à présent au nombre de 1 000 contre 500 organisations en 2000. Une commission nationale élabore actuellement un projet de loi relatif aux organismes de la société civile qui tient compte de la simplification de la procédure d’enregistrement des associations et vise à leur permettre de travailler avec plus de souplesse et de transparence et de réduire le contrôle direct de leurs activités par les autorités compétentes. On trouvera, en annexe, des exemples des différents types d’associations autorisées en République arabe syrienne.