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Le Groupe de travail sur la détention arbitraire, réuni au cours de sa 61e session, a conclu à la nature arbitraire de la détention des deux militantes syriennes Tal Al-Mallouhi et Tuhama Maruf. Il réaffirme, à la lumière des violations des droits de l'homme actuelles, le principe de la responsabilité pénale individuelle dans la pratique généralisée de la détention arbitraire considérée comme crime contre l'humanité.
Tal Al-Mallouhi, jeune blogueuse de 20 ans arrêtée le 27 décembre 2009 à Damas par les services de la sûreté de l'Etat, a été accusée d'espionnage et condamnée à cinq ans d'emprisonnement par la Haute Cour de la sûreté de l'Etat à l'issue d'un procès inéquitable, après avoir été détenue au secret pendant plus de dix mois sans aucune protection légale. Quant à Tuhama Ma'ruf, elle avait été condamnée le 5 janvier 1995 à six ans de prison par la Cour suprême de la sûreté de l'Etat pour appartenance à au Parti du Travail communiste, interdit depuis le début des annéees 1980. Cette peine n'avait pas été appliquée et c'est plus de quinze ans après qu'elle a été ré-arrêtée en février 2010 puis placée en détention pour l'exécution de cette peine. Tuhama Ma'ruf a été libérée après avoir bénéficié de l'amnistie générale présidentielle promulguée le 1er juin 2011.
Dans les avis 38/2011 et 39/2011 adoptés le 1er septembre, les experts onusiens concluent à la « privation injustifiée de l'exercice du droit fondamental à la liberté d'expression et d'opinion » des deux Syriennes, établissant ainsi le caractère arbitraire de leur détention conformément à la catégorie II du Groupe de travail .
Les experts rappellent également la jurisprudence du Groupe de travail, des Comités des droits de l'homme et contre la torture établissant que le recours aux tribunaux militaires et autres juridictions spéciales constitue « une atteinte aux obligations internationales des droits de l'homme », en cela qu'elles « ne fonctionnent pas selon les normes internationales régissant les tribunaux », en particulier « les garanties énoncées à l'article 14 du Pacte. ». En l'espèce, les deux militantes syriennes ont été jugées par une cour lde sûreté de l'Etat, juridiction d'exception contrôlée par le ministère de l'Intérieur et n'ont bénéficié, ainsi que le relève le Groupe de travail d'aucune des garanties internationales relatives à un procès équitable telles qu'énoncées aux articles 10 et 11 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et à l'article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ainsi que la violation des articles 9 des deux conventions, sont d'une gravité telle que la privation de liberté des deux Syriennes revêt un caractère arbitraire, conformément à la catégorie III du Groupe de travail.
Les experts exhortent les autorités syriennes à libérer immédiatement Tal Al-Mallouhi et toutes les victimes de détention arbitraire et à les indemniser.
Il est important de relever que dans cet avis, les experts rappellent également à juste titre que l'obligation de respecter les normes internationales des droits de l'homme n'incombe pas seulement à l'Etat mais aussi à tous les agents de l'Etat considérés individuellement, qu'il s'agisse de juges, de policier ou d'agents pénitentiaires. Aussi, les experts insistent sur le fait que la pratique de la détention arbitraire lorsqu'elle constitue un crime contre l'humanité en vertu du droit international coutumier entraîne la responsabilité pénale individuelle de ses auteurs.