Le 1er juin 2012, le Comité contre la Torture a publié ses observations finales de son examen spécial de la Syrie qui s'est tenu deux semaines plus tôt, le 16 mai 2012. En premier lieu, le Comité "demande à la République arabe syrienne de lui soumettre, pour le 31 août au plus tard, un rapport spécial de suivi" sur les mesures prises afin de mettre en œuvre les recommandations qui lui ont été faites à l'issue de cet examen spécial. Alkarama y a contribué en présentant au Comité un rapport alternatif sur la torture généralisée et systématique en Syrie et en participant, la veille de l'examen, à la réunion d'information de l'ONG.
Le 16 mai 2012, les experts du Comité contre la Torture ont procédé à l'examen de la République arabe de Syrie, en l'absence d'une délégation syrienne. L'examen a été retransmis sur le Web par Alkarama (disponible plus bas). Les autorités syriennes avaient omis de soumettre un rapport spécial, comme le Comité l'avait demandé, et ont préféré accuser le groupe d'experts en charge de la prévention de la torture, de "fournir des informations inexactes et partiales (...) dans un processus similaire à celui du blanchiment d'argent." Ceci marque un nouveau coup dur pour la coopération de la Syrie avec les mécanismes onusiens des droits de l'homme.
Comité contre la torture - Examen Spécial de la Syrie- 16mai 2012 (version arabe)
Quelques-unes des recommandations les plus importantes du Comité aux autorités syriennes concernent "la fin des graves violations généralisées et continues à l'encontre de toutes les personnes sous leur juridiction" et "la réaffirmation sans ambiguïté du caractère absolu de l'interdiction de la torture, de même que l'abolition immédiate et la condamnation publique des pratiques généralisées et systématiques de torture (...), accompagnées d'un avertissement clair que toute personne commettant de tels actes (...) en sera personnellement tenue responsable devant la loi." Plus concrètement, le Comité recommande de "libérer toutes les prisonniers détenus arbitrairement; et de veiller à ce que personne ne soit incarcéré dans des centres de détention secrets." Ces recommandations se fondent sur le raisonnement du Comité que "ces centres de détention secrets constituent en soi un non-respect de la Convention et conduisent inévitablement à des cas de torture et de mauvais traitements."
Notons que le Comité n'affirme pas explicitement l'existence de crimes contre l'humanité en Syrie, ni ne recommande de saisir la Cour Pénale Internationale (CPI). Toutefois, le Comité tient compte à la fois des conclusions de la Commission d'Enquête Internationale Indépendante, à propos de la responsabilité pénale de hauts responsables dans des crimes contre l'humanité, ainsi que de l'évaluation par la Haut Commissaire aux Droits de l'Homme des meurtres commis à Al Houla, qui "peuvent être assimilés à des crimes contre l'humanité ou d'autres formes de criminalité internationale." A la lecture, dans leur ensemble, des observations finales du Comité contre la Torture, il apparaît que les experts ont délibérément intégré la terminologie du Statut de Rome dans leur texte, ce qui peut être interprété comme l'adhésion implicite du Comité au renvoi de l'affaire devant la CPI.
Alkarama se félicite du fait que le Comité ait décidé non seulement de remettre d'importantes observations finales, mais aussi de demander aux autorités syriennes de lui fournir un rapport de suivi, à la prochaine occasion qui se présente, ce qui met en évidence la résolution du Comité de rester saisi de la question. Alarmés par les violations persistantes et généralisées commises en Syrie, nous allons continuer à surveiller la situation et avons l'intention de fournir des informations au Comité contre la Torture, dans le cadre du suivi de l'examen spécial.