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القمع في تونس

Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Volker Türk, s’est dit préoccupé par l’escalade de la répression en Tunisie contre la société civile et les opposants politiques du président Kaïs Saïed.

Le porte-parole du Haut-Commissaire, Jeremy Lawrence, a déclaré aux journalistes à Genève qu’au moins neuf personnes auraient été arrêtées et certaines détenues pour des accusations de sécurité et de corruption.

Alkarama a appris que parmi les détenus figurait le juge Bechir Akremi, au sujet duquel Alkarama et l'Association des victimes de la torture en Tunisie (AVTT) ont déposé une plainte auprès du Rapporteur spécial des Nations unies sur l'indépendance des juges et des avocats afin de l'informer des mesures arbitraires dont il fait l'objet, notamment son arrestation, sa suspension, les intimidations et représailles dans l'exercice de ses fonctions.

Un autre juge, un avocat, un éminent homme d'affaires, un directeur d'une station de radio et le dirigeant du parti islamiste Ennahda ont également été arrêtés.

Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) a noté que de plus en plus de poursuites sont engagées par le parquet tunisien contre de supposés opposants au président, les accusant de « conspiration contre la sûreté de l’État », d'offense au chef de l’État ou de violation du décret-loi sur la lutte contre la cybercriminalité.

Le HCDH s’est également dit préoccupé par le fait que certains détenus accusés d’avoir critiqué le gouvernement ont été traduits devant des tribunaux militaires. Lawrence a appelé "les autorités à cesser immédiatement la pratique consistant à juger des civils devant des tribunaux militaires". Il a ajouté que depuis juillet 2021, les autorités ont également pris une série de mesures qui ont porté atteinte à l’indépendance du pouvoir judiciaire, notamment la dissolution du Conseil supérieur de la magistrature et la révocation de 57 juges.

Actions d’Alkarama

Dans son rapport annuel 2022 récemment publié, Alkarama a souligné la détérioration de la situation des droits de l'homme en Tunisie et exprimé ses principales préoccupations. Ces dernières avaient été longuement évoquées dans le rapport alternatif soumis par Alkarama au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies dans le cadre du dernier examen périodique universel de la Tunisie.

La crise politique dans le pays s’est aggravée depuis le 25 juillet 2021, date à laquelle le président Kaïs Saïed a limogé le Premier ministre, suspendu -puis dissout- le parlement pendant 30 jours et assumé toutes les fonctions exécutives et législatives.

Cette prise de pouvoir par l’exécutif a conduit à de nombreux abus, y compris contre le pouvoir judiciaire, ainsi qu’au harcèlement des journalistes. Pour légitimer la situation, un référendum constitutionnel a été organisé en juillet 2022, suivi d’élections législatives en décembre 2022, avec un taux de boycott sans précédent de 90%.

Depuis lors, un nombre croissant de procédures pénales ont été documentées contre des blogueurs ou des utilisateurs de médias sociaux pour avoir exprimé pacifiquement des opinions dissidentes ou critiqué le pouvoir exécutif. Nombre d’entre eux ont fait l’objet d’enquêtes ou d’accusations, et ont souvent été reconnus coupables d'accusations telles que diffamation, outrage aux institutions de l'État et "atteinte" à autrui via les réseaux de communication.

De plus, les autorités ont eu recours à des procès militaires contre des civils pour avoir critiqué publiquement le président, comme dans le cas du journaliste et analyste politique Salah Attia. Le 17 août 2022, Alkarama et l’Association des victimes de la torture en Tunisie ont déposé en son nom une plainte auprès du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression. Le 16 août 2022, le tribunal militaire permanent de Tunis l'a condamné à trois mois de prison pour « atteinte à la sûreté de l'État et au moral de l'armée ».