06 mai 2008
Alkarama for Human Rights, 6 mai 2008
Des représentants d’Alkarama ont assisté à l’examen du rapport périodique algérien par le Comité contre la torture (CAT) qui s’est déroulé le 2 et 5 mai 2008. L’organisation avait présenté quelques semaines auparavant un rapport alternatif au Comité.
L’examen par le CAT fait suite à celui du Comité des droits de l’homme en octobre 2007. A cette occasion de nombreuses violations de principes du Pacte international relatif aux droits civils et politiques avaient été relevées. Les préoccupations portaient notamment sur l’existence de centres de détention secrets soustraits au contrôle des autorités civiles et sur l’impunité accordée aux auteurs de crimes internationaux.
Quand les défenseurs des droits de l’homme sont pris à partie
Anticipant sur les questions critiques des experts du CAT, le Chef de la délégation algérienne, M. Idriss Jazaïri, a d’emblée dans son allocution introductive abordé ces points concrets en prétendant que « la présumée existence de centres de détention au secret n’existe que dans l’imagination des auteurs de ces ragots ».
M. Jazaïri reproche aux défenseurs des droits de l’homme d’avoir cherché par leurs « insinuations » à « semer le doute dans les esprits non avertis » en renvoyant dos à dos les criminels et les forces de sécurité. Plus grave encore, il les accuse d’avoir par « leur silence et parfois par leurs faux fuyants » instrumentalisé le terrorisme et en conséquence de porter « une lourde responsabilité dans la perte de vies humaines ».
Les experts du CAT ne se sont pas laissés impressionner par les menaces à peines voilées du représentant algérien. Il est même probable que ses propos confortent un certain nombre de leurs préoccupations et leurs questions n’ont pas manqué de pertinence. A commencer par certaines notions qu’ils considèrent comme étant floues. Ainsi M. Grossman (Chili), le Président rapporteur, demande si ce qui est désigné par une « menace à l’ordre public » et qui justifierait le maintient de l’état d’urgence correspondrait effectivement à un danger réel et non spéculatif ? Dans le même ordre des choses, il constate que des dispositions du décret du 30 septembre 1992 relatif à la lutte contre la subversion et le terrorisme ont été intégrées dans le Code pénal en 1995. Or, la définition du terrorisme y est – selon lui –trop large et trop imprécise et constituerait une entrave au respect de normes strictes dans le droit international.
L’impunité des forces de sécurité au cœur du débat
M. Grossman rappelle l’inquiétude du Comité par rapport à l’amnistie accordée à la fois aux forces de sécurité et à certains membres de groupes armés. Pour cette catégorie de personnes, Mme Gaer (USA) sollicite des informations supplémentaires sur les enquêtes et les condamnations de ceux qui se sont rendus coupables par exemple de viols et qui ne sont pas amnistiés par la loi.
A l’instar de plusieurs de ses collègues, le Président du CAT constate que l’article 45 de l’ordonnance d’application de la charte pour la paix et la réconciliation ne prévoit pas de procédure légale à l’encontre des membres des services de sécurité ayant commis des crimes. Il relève aussi que ce texte de loi ne fixe pas de délai d’application de ces dispositions, et qu’il n’est donc pas connu si elles sont rétroactives ou valables dans le présent et dans l’avenir. Il rappelle que les normes internationales interdisent la prescription ou l’amnistie de crimes internationaux tels le génocide ou la torture.
M. Jazaïri tente d’expliquer au panel d’experts que l'état ne pouvait pas poursuivre les soldats engagés dans des opérations militaires. Mais qu’en est-il alors des policiers, gendarmes, membres de groupes de légitime défense et autres membres du DRS qui ont arrêté, enlevé et fait disparaître, commis des viols, torturé et exécuté sommairement des milliers de personnes ? M. Jazaïri considère donc que ces catégories d’agents de l’Etat sont passibles de poursuites pour de tels crimes et sont en conséquence exclues des dispositions d’amnistie.
Répondant aux critiques des experts à propos de l’article 46 de cette même ordonnance qui pénalise toute version « non autorisée » des évènements ayant ensanglantés l’Algérie, M. Jazaïri ne laisse plus aucun doute sur la nature de cette disposition qu’il compare à celles « analogues qui condamnent le révisionnisme» en Europe. L’histoire contemporaine de l’Algérie s’écrit donc sous la menace d’emprisonnement des récalcitrants.
Considérant que refuser l’impunité est la meilleure éducation au respect des droits de l’homme, M. Grossman sollicite de la délégation algérienne de nombreuses précisions sur la formation des agents de l’Etat et en particulier ceux des services de renseignements (Département du renseignement et de la sécurité, DRS), sur les compétences de ces derniers, les lieux de détention qu’ils contrôlent, les plaintes déposées contre eux pour torture et leur suivi et finalement les mesures disciplinaires pour abus.
Aussi, pour pouvoir déposer plainte contre ces agents, faut il connaître leurs noms, leurs grades et les responsabilités qu’ils remplissent. M. Marino (Espagne) se demande à juste titre si ces officiers, restés anonymes, ne se fondent pas dans la Sécurité militaire. Effectivement, de nombreux PV d’interrogatoires ne comportent que les prénoms des officiers.
Mais pour pouvoir déposer plainte, la victime doit être informée de ce droit. Est ce le cas en Algérie ? Très concrètement, M. Marino demande des précisions sur le cas de Mounir Hammouche, décédé sous la torture durant sa garde à vue dans les locaux du DRS en décembre 2006. Jusqu’à ce jour, la famille n’a pas pu avoir accès au rapport d’autopsie.
Dans ce contexte se pose la question de la compétence de l’autorité judiciaire sur les différents services, en particulier sur le DRS : existe-t-il des registres de détention ? Les juges peuvent ils intervenir en cas de suspicion de torture ou de disparition ? Les aveux obtenus sous la torture sont ils exclus de la procédure ?
Le Chef de la délégation algérienne ne fournira aucun éclaircissement sur le DRS, dont il s’abstient de citer même le nom, considérant qu’il s’agit d’une « institution républicaine » et que « ceux qui s’y attaquent, s’attaquent à la République algérienne ».
Quand les disparitions forcées sont qualifiées de « crimes contre l’humanité »
Plusieurs membres de l’organe onusien, parmi lesquels M. Kovalev (Russie) et M. Grossman, expriment leur réprobation quant au traitement de la question des disparus qu’ils qualifient sans ambages de « crime contre l’humanité ». M. Jazaïri, dans ses réponses, précisera que le Président de la République a reconnu la « responsabilité civile de l’Etat » dans ce dossier. Le dilemme serait donc selon lui que « Si on les [les forces de sécurité] culpabilise aujourd’hui, qui protégera la patrie demain menacée ». Voilà qui expliquerait donc la nécessité d’une amnistie, qu’il ne veut en aucun cas reconnaître dans le fameux article 45 de l’ordonnance sus-mentionnée. Selon lui, « l’article 45 protège (..) les forces de sécurité d’actions pénales et non pas des crimes de droit commun commis individuellement ». C’est dans cette logique qu’il faut comprendre que les 32 agents de l’Etat mentionnés par la délégation qui depuis 1999 auraient été condamnés pour torture ont donc commis individuellement des crimes de droit commun.
Les experts considèrent également que l’exigence pour reconnaître la disparition d’une personne de prouver que celle-ci est morte est une charge très lourde pour les proches. Cette déclaration de décès par la famille, indispensable pour pouvoir bénéficier d’indemnisations, est incompatible avec les normes internationales. Comme le Comité des droits de l’homme avant lui, le CAT demande que les listes de disparus soient rendues publiques. M. Jazaïri tente encore d’expliquer que ces listes ne sont pas publiées par décence et par respect pour les familles. Il considère, à la stupéfaction des personnes présentes, que cela équivaudrait à publier la liste des personnes divorcées, ce qui constituerait une atteinte à la vie privée et ajoute « qui voudrait provoquer des protestations comme celles lors de la publication des listes de contribuables en Italie » ?
Pas d’Etat de droit sous l’état d’urgence
De nombreux experts à commencer par Mme Belmir (Maroc), co-rapporteur du Comité, se sont attardés sur le maintien de l’état d’urgence et ont énoncé les nombreuses conséquences qui en découlent : le pouvoir exécutif est renforcé, la justice militaire fonctionne dans un cadre d’exception, la situation n’est pas celle d’un état de droit et les libertés individuelles sont restreintes. M. Gaye (Sénégal) constate pour sa part que cet état ouvre la porte à tous les abus et demande « quand y aura-t-il une fin » à cet état d’urgence ?
M. Jazaïri répondra à cette question par une fin de non recevoir considérant que « l’état d’urgence est la continuité de l’état de droit dans certaines circonstances exceptionnelles ». Et expliquera que « tant que le terrorisme persistera, même résiduel, l’état d’urgence doit être maintenu ». Il s’en prendra d’ailleurs vivement à Mme Belmir personnellement, ce qui suscitera l’incompréhension notamment de M. Grossman qui s’empressera de relever la compétence, l’intégrité et son entière confiance dans sa collègue.
Plusieurs experts, parmi lesquels Mme Gaer, ont rappelé que l’Algérie qui persiste à affirmer sa volonté de coopération avec les mécanismes de l’ONU, a jusqu’à présent rejeté les demandes de visite des rapporteurs spéciaux sur la torture, les disparitions forcées et les exécutions sommaires. Il est vivement demandé aux autorités algériennes de s’engager plus concrètement sur cette question.
Sur cette question, l’ambassadeur algérien n’a pas encore une fois réussi à convaincre les experts onusiens en prétendant que les rapporteurs spéciaux « n’avaient pas précisé l’objet de leur visite » et qu’il ne comprenait pas pourquoi le rapporteur spécial sur la torture voulait venir en Algérie.
Les experts ont été unanimes pour partager l’avis de M. Chiriboga (Equateur) qui déplore le maintien de l’état d’urgence, demande des précisions sur sa durée, s’inquiète de l’impunité des auteurs de crimes en recommandant leur traduction en justice et déclare qu’il ne peut y avoir de réconciliation nationale sans régler le problème de l’impunité.
Prenant la parole à la fin de la première session, M. Jazaïri avait exprimé son étonnement et sa désapprobation laissant entendre que les experts étaient subjectifs et mus par des « préjugés » Le représentant algérien avait alors conclu qu’en écoutant leurs questions, il se demandait s’ils parlaient vraiment de l’Algérie. « On avait l’impression que vous parliez d’une dictature ». M. Jazaïri ne croyait pas alors si bien dire…
Des représentants d’Alkarama ont assisté à l’examen du rapport périodique algérien par le Comité contre la torture (CAT) qui s’est déroulé le 2 et 5 mai 2008. L’organisation avait présenté quelques semaines auparavant un rapport alternatif au Comité.
L’examen par le CAT fait suite à celui du Comité des droits de l’homme en octobre 2007. A cette occasion de nombreuses violations de principes du Pacte international relatif aux droits civils et politiques avaient été relevées. Les préoccupations portaient notamment sur l’existence de centres de détention secrets soustraits au contrôle des autorités civiles et sur l’impunité accordée aux auteurs de crimes internationaux.
Quand les défenseurs des droits de l’homme sont pris à partie
Anticipant sur les questions critiques des experts du CAT, le Chef de la délégation algérienne, M. Idriss Jazaïri, a d’emblée dans son allocution introductive abordé ces points concrets en prétendant que « la présumée existence de centres de détention au secret n’existe que dans l’imagination des auteurs de ces ragots ».
M. Jazaïri reproche aux défenseurs des droits de l’homme d’avoir cherché par leurs « insinuations » à « semer le doute dans les esprits non avertis » en renvoyant dos à dos les criminels et les forces de sécurité. Plus grave encore, il les accuse d’avoir par « leur silence et parfois par leurs faux fuyants » instrumentalisé le terrorisme et en conséquence de porter « une lourde responsabilité dans la perte de vies humaines ».
Les experts du CAT ne se sont pas laissés impressionner par les menaces à peines voilées du représentant algérien. Il est même probable que ses propos confortent un certain nombre de leurs préoccupations et leurs questions n’ont pas manqué de pertinence. A commencer par certaines notions qu’ils considèrent comme étant floues. Ainsi M. Grossman (Chili), le Président rapporteur, demande si ce qui est désigné par une « menace à l’ordre public » et qui justifierait le maintient de l’état d’urgence correspondrait effectivement à un danger réel et non spéculatif ? Dans le même ordre des choses, il constate que des dispositions du décret du 30 septembre 1992 relatif à la lutte contre la subversion et le terrorisme ont été intégrées dans le Code pénal en 1995. Or, la définition du terrorisme y est – selon lui –trop large et trop imprécise et constituerait une entrave au respect de normes strictes dans le droit international.
L’impunité des forces de sécurité au cœur du débat
M. Grossman rappelle l’inquiétude du Comité par rapport à l’amnistie accordée à la fois aux forces de sécurité et à certains membres de groupes armés. Pour cette catégorie de personnes, Mme Gaer (USA) sollicite des informations supplémentaires sur les enquêtes et les condamnations de ceux qui se sont rendus coupables par exemple de viols et qui ne sont pas amnistiés par la loi.
A l’instar de plusieurs de ses collègues, le Président du CAT constate que l’article 45 de l’ordonnance d’application de la charte pour la paix et la réconciliation ne prévoit pas de procédure légale à l’encontre des membres des services de sécurité ayant commis des crimes. Il relève aussi que ce texte de loi ne fixe pas de délai d’application de ces dispositions, et qu’il n’est donc pas connu si elles sont rétroactives ou valables dans le présent et dans l’avenir. Il rappelle que les normes internationales interdisent la prescription ou l’amnistie de crimes internationaux tels le génocide ou la torture.
M. Jazaïri tente d’expliquer au panel d’experts que l'état ne pouvait pas poursuivre les soldats engagés dans des opérations militaires. Mais qu’en est-il alors des policiers, gendarmes, membres de groupes de légitime défense et autres membres du DRS qui ont arrêté, enlevé et fait disparaître, commis des viols, torturé et exécuté sommairement des milliers de personnes ? M. Jazaïri considère donc que ces catégories d’agents de l’Etat sont passibles de poursuites pour de tels crimes et sont en conséquence exclues des dispositions d’amnistie.
Répondant aux critiques des experts à propos de l’article 46 de cette même ordonnance qui pénalise toute version « non autorisée » des évènements ayant ensanglantés l’Algérie, M. Jazaïri ne laisse plus aucun doute sur la nature de cette disposition qu’il compare à celles « analogues qui condamnent le révisionnisme» en Europe. L’histoire contemporaine de l’Algérie s’écrit donc sous la menace d’emprisonnement des récalcitrants.
Considérant que refuser l’impunité est la meilleure éducation au respect des droits de l’homme, M. Grossman sollicite de la délégation algérienne de nombreuses précisions sur la formation des agents de l’Etat et en particulier ceux des services de renseignements (Département du renseignement et de la sécurité, DRS), sur les compétences de ces derniers, les lieux de détention qu’ils contrôlent, les plaintes déposées contre eux pour torture et leur suivi et finalement les mesures disciplinaires pour abus.
Aussi, pour pouvoir déposer plainte contre ces agents, faut il connaître leurs noms, leurs grades et les responsabilités qu’ils remplissent. M. Marino (Espagne) se demande à juste titre si ces officiers, restés anonymes, ne se fondent pas dans la Sécurité militaire. Effectivement, de nombreux PV d’interrogatoires ne comportent que les prénoms des officiers.
Mais pour pouvoir déposer plainte, la victime doit être informée de ce droit. Est ce le cas en Algérie ? Très concrètement, M. Marino demande des précisions sur le cas de Mounir Hammouche, décédé sous la torture durant sa garde à vue dans les locaux du DRS en décembre 2006. Jusqu’à ce jour, la famille n’a pas pu avoir accès au rapport d’autopsie.
Dans ce contexte se pose la question de la compétence de l’autorité judiciaire sur les différents services, en particulier sur le DRS : existe-t-il des registres de détention ? Les juges peuvent ils intervenir en cas de suspicion de torture ou de disparition ? Les aveux obtenus sous la torture sont ils exclus de la procédure ?
Le Chef de la délégation algérienne ne fournira aucun éclaircissement sur le DRS, dont il s’abstient de citer même le nom, considérant qu’il s’agit d’une « institution républicaine » et que « ceux qui s’y attaquent, s’attaquent à la République algérienne ».
Quand les disparitions forcées sont qualifiées de « crimes contre l’humanité »
Plusieurs membres de l’organe onusien, parmi lesquels M. Kovalev (Russie) et M. Grossman, expriment leur réprobation quant au traitement de la question des disparus qu’ils qualifient sans ambages de « crime contre l’humanité ». M. Jazaïri, dans ses réponses, précisera que le Président de la République a reconnu la « responsabilité civile de l’Etat » dans ce dossier. Le dilemme serait donc selon lui que « Si on les [les forces de sécurité] culpabilise aujourd’hui, qui protégera la patrie demain menacée ». Voilà qui expliquerait donc la nécessité d’une amnistie, qu’il ne veut en aucun cas reconnaître dans le fameux article 45 de l’ordonnance sus-mentionnée. Selon lui, « l’article 45 protège (..) les forces de sécurité d’actions pénales et non pas des crimes de droit commun commis individuellement ». C’est dans cette logique qu’il faut comprendre que les 32 agents de l’Etat mentionnés par la délégation qui depuis 1999 auraient été condamnés pour torture ont donc commis individuellement des crimes de droit commun.
Les experts considèrent également que l’exigence pour reconnaître la disparition d’une personne de prouver que celle-ci est morte est une charge très lourde pour les proches. Cette déclaration de décès par la famille, indispensable pour pouvoir bénéficier d’indemnisations, est incompatible avec les normes internationales. Comme le Comité des droits de l’homme avant lui, le CAT demande que les listes de disparus soient rendues publiques. M. Jazaïri tente encore d’expliquer que ces listes ne sont pas publiées par décence et par respect pour les familles. Il considère, à la stupéfaction des personnes présentes, que cela équivaudrait à publier la liste des personnes divorcées, ce qui constituerait une atteinte à la vie privée et ajoute « qui voudrait provoquer des protestations comme celles lors de la publication des listes de contribuables en Italie » ?
Pas d’Etat de droit sous l’état d’urgence
De nombreux experts à commencer par Mme Belmir (Maroc), co-rapporteur du Comité, se sont attardés sur le maintien de l’état d’urgence et ont énoncé les nombreuses conséquences qui en découlent : le pouvoir exécutif est renforcé, la justice militaire fonctionne dans un cadre d’exception, la situation n’est pas celle d’un état de droit et les libertés individuelles sont restreintes. M. Gaye (Sénégal) constate pour sa part que cet état ouvre la porte à tous les abus et demande « quand y aura-t-il une fin » à cet état d’urgence ?
M. Jazaïri répondra à cette question par une fin de non recevoir considérant que « l’état d’urgence est la continuité de l’état de droit dans certaines circonstances exceptionnelles ». Et expliquera que « tant que le terrorisme persistera, même résiduel, l’état d’urgence doit être maintenu ». Il s’en prendra d’ailleurs vivement à Mme Belmir personnellement, ce qui suscitera l’incompréhension notamment de M. Grossman qui s’empressera de relever la compétence, l’intégrité et son entière confiance dans sa collègue.
Plusieurs experts, parmi lesquels Mme Gaer, ont rappelé que l’Algérie qui persiste à affirmer sa volonté de coopération avec les mécanismes de l’ONU, a jusqu’à présent rejeté les demandes de visite des rapporteurs spéciaux sur la torture, les disparitions forcées et les exécutions sommaires. Il est vivement demandé aux autorités algériennes de s’engager plus concrètement sur cette question.
Sur cette question, l’ambassadeur algérien n’a pas encore une fois réussi à convaincre les experts onusiens en prétendant que les rapporteurs spéciaux « n’avaient pas précisé l’objet de leur visite » et qu’il ne comprenait pas pourquoi le rapporteur spécial sur la torture voulait venir en Algérie.
Les experts ont été unanimes pour partager l’avis de M. Chiriboga (Equateur) qui déplore le maintien de l’état d’urgence, demande des précisions sur sa durée, s’inquiète de l’impunité des auteurs de crimes en recommandant leur traduction en justice et déclare qu’il ne peut y avoir de réconciliation nationale sans régler le problème de l’impunité.
Prenant la parole à la fin de la première session, M. Jazaïri avait exprimé son étonnement et sa désapprobation laissant entendre que les experts étaient subjectifs et mus par des « préjugés » Le représentant algérien avait alors conclu qu’en écoutant leurs questions, il se demandait s’ils parlaient vraiment de l’Algérie. « On avait l’impression que vous parliez d’une dictature ». M. Jazaïri ne croyait pas alors si bien dire…